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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Les atouts de la maison en paille

Depuis l’histoire des trois petits cochons, la paille n’a pas vraiment bonne réputation en construction. Et pourtant! En ballots, la paille est un excellent isolant thermique et acoustique naturel. Et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elle résiste très bien au feu et au temps.

Article écrit par Emmanuel Thevenon

À Montargis (45), rien ne distingue la maison «Feuillette» de ses voisines. Habitée sans interruption depuis sa création en 1921, cette demeure en très bon état présente pourtant une particularité : ses murs sont en paille! Une idée de Mr Feuillette, un ingénieur qui proposa, après le premier conflit mondial, de réaliser des maisons en bottes de paille afin de reconstruire le pays à peu de frais. Le principe ne fera pas école. Mais il prouve que, bien entretenue, une maison en paille peut durer très longtemps.
M. Feuillette reprenait une technique venue des États-Unis, plus précisément du Nebraska, quelques années après l’invention de la botteleuse, vers 1870. Dans cette région, peu pourvue en matériaux naturels, les habitants ont vite compris l’intérêt d’utiliser ces blocs légers et compacts comme d’énormes briques. Des centaines d’habitations virent ainsi le jour (maisons, écoles, églises), avant que le développement grandissant des transports de matériaux sonne le glas de la technique.
Il faut attendre les années 1980 pour que la paille refasse timidement son retour, après le premier choc pétrolier et la prise de conscience grandissante des problèmes écologiques. D’abord aux États-Unis, puis un peu partout dans le monde. Aujourd’hui, la France compte quelques centaines de maisons en paille. La plupart sont réalisées en auto-construction par des amateurs persuadés de trouver là un des meilleurs produits de construction. Des études scientifiques, comme celle de Montholier, dans le Jura, valident peu à peu leurs démarches : la paille mérite que l’on s’y attarde, tant elle présente de qualités.

UNE BRASSÉE D’ATOUTS
=> D’abord, son cycle de vie est remarquable. Le matériau est disponible partout (peu ou pas de transport), il est renouvelable et 100% biodégradable. Le mieux est évidement de choisir de la paille bio, sans intrants d’origine pétrolière, et donc sans résidus toxiques ni incidence sur le réchauffement climatique.
=> Résistance thermique : les maisons en ballots de paille ont des murs épais mais légers (de 80 à 180 kg par m3) qui présentent une isolation comparable à un mur de parpaings associé à 25 cm de laine de roche (R = 6). Un simple chauffage au bois situé au centre de la maison suffit alors pour assurer une atmosphère chaleureuse, même par les plus grands froids. À Saguenay, au Québec, les maisons du GREB (voir encadré) disposent seulement d’un poêle de masse. Chacune consomme environ 24 stères de bois par an. Une paille ! Si l’on considère que les températures peuvent atteindre –45°C en hiver!
=> Isolation phonique exceptionnelle : plusieurs studios d’enregistrement aux États-Unis sont construits avec des bottes de paille!
=> Qualité de l’air intérieur : la paille ne provoque pas d’allergie (contrairement au foin), elle ne contient pas de fibres irritantes comme les laines minérales, et n’émet pas de composés toxiques de type formaldéhyde à l’instar des isolants synthétiques.
=> Régulation de l’humidité : alors que les laines minérales perdent une grande partie de leurs capacités isolantes en présence d’humidité, la paille régule d’elle-même le taux d’humidité dans les parois et à l’intérieur de l’habitation. Cette «respiration» des parois et de la toiture évite les problèmes de condensation, sources de moisissures et de troubles pour la santé. Surtout, les habitants n’ont pas la sensation étouffante de vivre dans un sac en plastique. Inutile d’ajouter une VMC pour pallier les inconvénients d’une maison trop bien isolée avec des matériaux synthétiques.
=> Prix intéressant : La technique ne risque pas de vous mettre sur la paille! Si vous passez par un entrepreneur, le prix de revient est équivalent à celui d’une maison traditionnelle, mais la facture de chauffage est ensuite divisée par deux. En auto-construction, les tarifs chutent considérablement. À Berjou, en Normandie, Emmanuel Davière et sa compagne Nadège estiment que leur maison réalisée en auto-construction (164 m2, avec un étage et un grenier) ne devrait pas, au final, leur coûter plus de 50 000 €.
=> Construction accessible à tous. Inutile d’être un expert pour la mise en œuvre. «Même un enfant de 12 ans peut y arriver», note Bernard Lacoste, fondateur de la société Kasa Bio, qui conçoit et fabrique des bâtiments écologiques. Quelques stages organisés par des associations spécialisées suffisent souvent pour s’approprier la technique. Plus tard, vous pouvez vous-mêmes accueillir des stagiaires sur votre chantier pour participer à votre projet, et limiter ainsi vos dépenses de main d’œuvre.

QUELQUES INCONVÉNIENTS TOUT DE MÊME
Malgré ses grandes qualités, notamment contre la propagation du feu, la paille fait encore peur : il n’est pas toujours facile de convaincre une compagnie d’assurances de vous fournir une police multirisques habitation!
Enfin, la construction paille ne possède pas de DTU (Document Technique Unifié) nécessaire à l’obtention d’une garantie décennale. Elle reste donc difficile à mettre en œuvre par un professionnel du bâtiment. Pourtant, l’horizon pourrait s’éclaircir assez rapidement. En effet, au terme de son étude sur les maisons de paille, la Fédération Française du Bâtiment (FFB) affirmait en substance : «Un fort développement de ce marché est à prévoir dans les années à venir. Bien accompagnées et dotées des outils nécessaires pour la bonne utilisation de ces matériaux renouvelables, les entreprises du bâtiment répondront de manière satisfaisante à une partie grandissante de la clientèle, qui désire de plus en plus être entourée de matériaux naturels et sains.» Même son de cloche dans les associations : les demandes de stages pour la construction de maisons en paille doublent chaque année…

À LIRE
Bâtir en paille – Guide pratique de la construction en bottes de paille, André de Bouter, La Maison en paille, 2006.
Construire son habitation en paille selon la technique du GREB, V. Brossamain et J.-B. Thévard, édition V. Brossamain, 2006.
La Construction en bottes de paille, traduction française d’un ouvrage de S. O. MacDonald, de l’association «Builders without borders» à consulter et télécharger.
Construire en paille aujourd’hui, Astrid et Herbert Gruber, Terre Vivante, 2003.

SITES INTERNET
Réseau français de la construction en paille
La Maison en Paille (site généraliste)
Approche Paille (pour les auto-constructeurs qui veulent utiliser la technique du GREB)

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