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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Les remèdes Tsiganes de Moune

Pour ce joli mois de mai, je vous ai réservé une petite surprise. Je vous emmène avec moi sur les chemins nomades et magiques de mon enfance. Je voudrais vous faire découvrir les soins aux plantes sauvages que ma grand-mère et ma mère nous ont transmis, à mes frères et sœurs et à moi.

O Rom peske doktoris korkoro” Le tsigane est son propre médecin
C’est une jolie balade sur les sentiers de mon enfance tsigane sauvage et libre… Et grâce à elle, je suis ce que l’on appelle dans ma langue paternelle une Drabarni, une petite mère aux herbes.

LA LUNE
Mes ancêtres accordaient beaucoup d’importance à la position de la Lune pour choisir la période de cueillette et de fabrication des remèdes, parce qu’il est dit que l’énergie de la Lune est au cœur des plantes à ces moments précis.
=> Pour la cueillette en général : le top du top, c’est évidemment le solstice d’été (la Saint-Jean), mais ça n’est pas toujours possible à cause de la météo et de la période de floraison des plantes utilisées…
=> Pour la cueillette et la fabrication des remèdes avec des fleurs et des fruits : l’idéal, c’est pendant les 4 jours qui précèdent la pleine Lune.
=> Pour la cueillette et la fabrication des remèdes avec des tiges et des feuilles : 4 jours avant, pendant et 4 jours après la nouvelle Lune.
=> Pour la cueillette et la fabrication des remèdes avec des racines et des parties souterraines : 4 jours avant et pendant la nouvelle Lune.

Alors, bien évidemment, ça, c’est dans l’absolu, mais en pratique, ce n’est pas toujours facile à réaliser. Quoi qu’il en soit, il est important de se concentrer sur ce que l’on fait à l’instant où on le fait, c’est ce qu’on appelle l’instant présent. C’est être attentif et ne penser à rien d’autre. La cueillette est un moment privilégié où l’on est en lien, en connexion avec le végétal, et si votre esprit se met à vagabonder, soyez sûr que la plante vous rappellera à l’ordre. Essayez de cueillir la belle ortie ou la douce aubépine en pensant à autre chose et vous comprendrez ce que je viens de décrire…
Idem pour la fabrication, pensez à l’usage que vous souhaitez en faire, c’est une façon d’informer le remède fabriqué sur l’emploi qu’on attend de lui.

RECETTES & UTILISATION
Chaque recette a été un peu adaptée aux matières premières que l’on trouve facilement aujourd’hui.

SOUCI (Calendula officinalis)
Ramassé sur les bords des chemins, broyé et appliqué en direct, il était notre antiseptique cicatrisant de base, mais on peut se faire une pommade de souci, plus pratique et utilisable toute l’année.
Recette pour la pommade de souci  :
> Mettre une poignée de fleurs de souci fraîches ou sèches dans un bol de beurre de karité (qui remplace la graisse animale utilisée par mes ancêtres…).
> Faire fondre au bain-marie à feu doux pendant 3 h.
> Filtrer et mettre en pot stérilisé.
> Étiqueter.

SALICORNE (Salicornia)
La salicorne est un végétal qui pousse près des marais salants ou près des bords de mer, on peut la consommer, c’est très goûteux. Mes grands- mères s’en servaient pour fabriquer leur propre savon en utilisant les cendres de salicorne.
Quand leur chemin les menait près des côtes où pousse cette plante, la petite troupe en profitait pour faire un arrêt tout le temps que durait la fabrication du savon.
Les enfants jouaient dans l’eau pendant que les hommes faisaient brûler la salicorne pour la réduire en cendres. Ensuite, les femmes la mélangeaient à de l’huile d’olive, glanée et échangée sur les chemins du Sud, afin de créer la saponification*. Le mélange mijotait plusieurs heures dans le chaudron avant d’être coulé dans des moules (souvent des caisses en bois) pour le laisser durcir plusieurs jours.
Le savon était très précieux chez mes ancêtres qui, malgré la légende, en usaient et en abusaient. La propreté du corps était une chose avec laquelle on ne rigolait pas chez les tsiganes…

DES PLANTES ANTI-BLEUS
Lors de nos escapades champêtres, on tombait souvent, poussés par les plus grands (si, si !!!) et il y avait toujours une petite fiole d’huile ou de baume d’arnica (Arnica montana) qui se tenait à disposition pour contrer nos bosses et bleus. La pâquerette (Bellis perennis) et l’hélichryse (Hélichrysum italicum ou arenarium)  sont aussi d’excellents anti-bleus. À utiliser fraîches, écrasées sur l’endroit douloureux, ou en huile macérée ou en beurre végétal.
Huile macérée : macération solaire pendant 3 semaines de plantes sèches dans un bocal d’huile végétale, couvert d’un linge.
Beurre végétal : 2 cuillères à soupe (CS) d’huile macérée + 1 cuillère à café (CC) de cire d’abeille dans un pot et faire fondre le tout au bain-marie.

AIL (Allium sativum)
L’ail était dans toutes les pharmacopées tsiganes du temps de mon enfance ! On en mangeait à toutes les sauces, ma mère a toujours coutume de dire aujourd’hui que c’est “bon pour la santé !” et ma foi on était rarement malade, je dois bien l’avouer…
En cas de disette de plantes sèches, ma Nona avait deux remèdes de secours aux super vertus antibiotiques.
=> Elle faisait bouillir 1 gousse d’ail dans l’équivalent d’1 verre de lait pendant 5 mn. Elle ajoutait du miel et nous faisait boire le tout, bien chaud, 2-3 fois par jour…
Ou alors elle nous donnait 1 CC de bave d’escargot… si, si, rigolez pas, ça marche ! C’était d’ailleurs le remède favori de notre grand-mère, et la fratrie riait beaucoup… quand c’était pas son tour…

MILLEPERTUIS
Ma mère nous faisait ramasser le millepertuis (Hypericum perforatum) en pleine nature, le temps de notre nomadisme. C’est l’une des plantes les plus communes chez les tsiganes. Elle était souvent transformée en huile macérée pour faciliter l’application.
Utilisée sur les brûlures, elle était aussi utilisée par les plus vieux pour les douleurs inflammatoires.

PLANTAIN
En anti-inflammatoire, mon chouchou est le plantain (Plantago major ou lanceolata) utilisé en huile macérée, et mes ancêtres nomades en consommaient aussi les jeunes feuilles.
Quand on était gamins et sur les routes, ma mère frottait nos piqûres (d’insectes, d’orties…) avec du plantain froissé ou alors 3 feuilles de plantes distinctes froissées ensemble.

LE BAUME DU GITAN
Pour tout et n’importe quoi, c’est le baume du gitan qui fait office de panacée dans nos verdines (roulottes) et, comme je suis une gentille fille, je vous livre la recette, revue et corrigée par moi-même – oui, parce qu’à l’origine des rognures de sabot de cheval étaient incluses dans la recette…
Ingrédients :
– 2 CS d’huile macérée de millepertuis ou d’arnica ou de consoude
– 1 CC de cire d’abeille
– 10 gouttes d’huile essentielle (HE) de pin sylvestre (Pinus sylvestris)
– 10 gouttes d’HE de lavande fine (Lavandula angustifolia)
– 10 gouttes d’HE de cade (Juniperus oxycedrus).
Recette :
> Dans un pot stérile, faire fondre l’huile macérée avec la cire d’abeille, laisser refroidir un peu et rajouter les huiles essentielles. Bien mélanger et laisser figer.
> À utiliser sur tous les problèmes de peau, de douleurs et de maux divers.

Je ne vous livre ici qu’une petite partie des anecdotes et des remèdes de mon enfance, et vous l’aurez compris, je pourrais encore vous parler de mes ancêtres herboristes pendant des heures. Si vous avez des questions, je suis toujours là, lateliereconaturel.net, n’hésitez pas, je suis intarissable sur la vie, les traditions et la liberté de mes ancêtres nomades…

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