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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Mylène : danseuse, résistante et philosophe…

Je connais Mylène depuis deux ans. Très vite, elle est devenue une de mes proches, très proche. C’est Șirin, notre amie commune, qui nous a présentées. Elle m’avait déjà longuement parlé de Mylène, de sa jeunesse d’esprit, de son courage et de son enthousiasme, malgré l’âge et la maladie.

Mais je n’imaginais pas une telle résistance et une telle force. On a très vite sympathisé. Elle connaissait déjà mon histoire, mais moi, j’ignorais la sienne. De plus, elle parle très peu du passé. Mylène vit dans le présent. Elle ne veut pas ajouter au présent, qui est déjà bien difficile, le poids d’un passé pénible. Il m’a fallu du temps pour faire parler cette belle dame d’origine belge. 

SOUVENIRS FLOUS, TRÈS FLOUS
Née en 1925, Mylène a ouvert ses yeux dans un orphelinat. Son prénom officiel est Émilie. Elle en a conservé un souvenir âpre. Enfant, quand elle n’arrivait pas à suivre les règles irrationnelles de cet enfer, par exemple quand elle riait ou qu’elle chantait, elle était punie : une « bonne sœur » lui plongeait la tête dans l’eau de la baignoire, une fois, deux fois… jusqu’à ce qu’elle se sente défaillir. Elle a du mal à en parler.
À 18 ans, comme toutes les pensionnaires de cet âge, elle a été jetée dehors. Elle s’est retrouvée sans toit, à la rue. « Ce n’était pas facile pour une jeune fille, sans défense, qui ne connaissait pas la vie », dit-elle. D’ailleurs, connaître la vie ne change pas grand-chose, une femme est toujours en danger dans les rues, la nuit. De plus, on était en 1943, dans les années les plus sombres de la deuxième guerre mondiale.
Elle ne se souvient pas si les bonnes sœurs, les très bonnes sœurs, l’ont mise dehors en disant des prières… Mais elle n’a jamais oublié les visages des Nazis qui ramassaient les gens de la rue pour les envoyer dans les camps de travail. « C’est un train noir qui nous a emmenés dans une usine de dynamite, en Allemagne, où j’ai travaillé pendant deux ans. »
La Libération est arrivée. Mais pas pour autant la liberté pour Émilie. À 20 ans, elle retourne en Belgique, dans son pays natal, sans travail, sans maison, sans un sou. 
À 25 ans, elle se marie avec un homme  ; la vie avec lui est une nouvelle prison dans laquelle elle reste enfermée pendant 6 ans, en subissant des violences systématiques.« C’était un fou. J’avais très peur », dit-elle. Cette peur lui fera finalement quitter à 31 ans son pays natal, dont elle ne garde évidemment pas un bon souvenir.

LES ANNÉES DANSANTES SANS SÉCURITÉ SOCIALE…
Elle tourne son gouvernail vers la Mer du Nord pour trouver du travail. C’est là-bas qu’elle croise une grande danseuse espagnole et cette rencontre marque un tournant dans sa vie. Cette grande danseuse la fait travailler quelques mois et organise pour elle un premier voyage à Lausanne, début d’une vie de danseuse de cabaret. Émilie devient Mylène et  vit alors des années nomades de danseuse. Elle se produit à Genève, à Lyon, à Strasbourg, à Paris, à Rome, à Marseille, à Toulouse, à Rennes, à Reims, à Monaco… Elle danse beaucoup et gagne à peu près sa vie, mais sans jamais mettre deux centimes de côté et sans cotiser : « On ne le faisait pas dans le cabaret. »

AU LIEU DE DANSER, ELLE TREMBLE…
Aujourd’hui, Mylène est installée à Nice dans un tout petit studio dans lequel elle a le droit de rester jusqu’à la fin de sa vie. Elle ne mène pourtant pas une vie tranquille. Depuis 10 ans, elle est atteinte de Tremblement Essentiel, une maladie neurologique qui s’aggrave avec le temps. Cette maladie est une conséquence de ses années de danseuse et de la guerre. Elle a cherché des solutions, consulté plusieurs médecins, mais on lui a dit qu’il n’existait encore aucun traitement permettant de stopper l’évolution du Tremblement Essentiel. Mylène vit avec un revenu de base, le Minimum vieillesse. Elle n’a pas le droit à la CMU…

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