communauteSans
Communauté
boutiqueSans
Boutique
Image décorative. En cliquant dessus, on découvre les différents abonnements proposés par Rebelle-Santé
S’ABONNER

La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Des enfants en quĂȘte du lien

qui les unit Ă  la terre

Les enfants devraient vivre au grand air, face Ă  face avec la nature qui fortifie le corps, qui poĂ©tise l’ñme et Ă©veille en eux une curiositĂ© plus prĂ©cieuse pour l’éducation que toutes les grammaires du monde. »

Cette citation d’Alexandre Dumas sert de conclusion au documentaire de FrĂ©dĂ©ric PlĂ©nard, Le Lien, sorti en 2015, dans lequel il filmait cinq enfants citadins accompagnĂ©s et confrontĂ©s pour la premiĂšre fois Ă  la pleine nature dans les PyrĂ©nĂ©es. Ce professeur de SVT (Sciences et Vie de la Terre), Ă©galement rĂ©alisateur, renouvelle aujourd’hui l’expĂ©rience Ă  plus grande Ă©chelle Ă  travers un projet pĂ©dagogique conçu sur toute la France, chapeautĂ© par son association Le Grand Secret du Lien. Rencontre.

Comment est nĂ© ce projet et l’association du Grand Secret du Lien ?
Dans le contexte d’urgence et de transition Ă©cologique actuel, la reconnexion au sensible et Ă  la nature devient impĂ©rative et passe par l’éducation des gĂ©nĂ©rations futures. C’est l’objectif de ce projet que je nourris depuis trĂšs longtemps. En enseignant les SVT pendant une quinzaine d’annĂ©es, j’ai toujours organisĂ© divers projets avec mes Ă©lĂšves en extĂ©rieur, veillĂ© Ă  complĂ©ter la connaissance intellectuelle d’une expĂ©rience sensible. Je me considĂšre ainsi avant tout comme un Ă©ducateur option SVT plutĂŽt qu’un professeur, dans le sens oĂč je ne transmets rien Ă  mes Ă©lĂšves qu’ils n’apprennent par eux-mĂȘmes.

AprĂšs avoir montĂ© ma sociĂ©tĂ© d’audiovisuel et rĂ©alisĂ© quelques documentaires, je me suis lancĂ© dans la rĂ©alisation du film Le Lien dans le but d’interroger les possibilitĂ©s d’une reconnexion Ă  la nature, par le sensible, d’enfants issus des villes. Ils ont donc passĂ© dix jours d’immersion en pleine nature avec des accompagnants spĂ©cialisĂ©s et en sont sortis transformĂ©s. MĂȘme si les conditions Ă©taient idĂ©ales, l’expĂ©rience a largement dĂ©passĂ© mes espĂ©rances. J’ai vu des gamins qui, au dĂ©part, ne savaient pas ce qu’était un arbre et qui, petit Ă  petit, ont pris goĂ»t Ă  se laver dans la riviĂšre, dormir Ă  la belle Ă©toile, faire du feu ou construire des barrages. Dix jours ont suffi Ă  les responsabiliser en leur donnant confiance en eux. Le documentaire est sorti en 2015, en autoproduction et, malgrĂ© les difficultĂ©s, nous avons pu organiser prĂšs de 80 projections Ă  travers toute la France et rencontrer un public composĂ© d’enfants, de leurs parents, d’enseignants, de tout un rĂ©seau Ă©ducatif et associatif. Une conscience collective Ă©merge aujourd’hui autour du dĂ©sir de nature. De lĂ , a germĂ© l’idĂ©e de gĂ©nĂ©raliser l’expĂ©rience Ă  l’échelle nationale, en imaginant un projet pĂ©dagogique global pour reconnecter les enfants Ă  la nature au sein de l’Association Le Grand Secret du Lien.

Comment s’articule concrùtement le projet ?
C’est un projet pĂ©dagogique pilote qui propose 25 jours d’immersion en pleine nature, entre septembre 2017 et octobre 2018 pour 5 groupes d’une dizaine d’enfants de 9 Ă  20 ans, organisĂ©s dans 5 rĂ©gions de France. Ces enfants ont Ă©tĂ© choisis par les structures rĂ©gionales partenaires (Grand Est, Nouvelle Aquitaine, Centre Val-de-Loire, Normandie et Auvergne RhĂŽne-Alpes). Ils appartiennent Ă  tous les milieux sociaux et sont rĂ©partis par tranches d’ñge. Si on ne peut pas ĂȘtre reprĂ©sentatif de tous les enfants, il s’agissait d’avoir un Ă©chantillonnage le plus ouvert possible, de mĂȘme que chaque rĂ©gion propose des milieux naturels diversifiĂ©s (mer, montagne, forĂȘt, riviĂšre, hauts plateaux). Des mini sĂ©jours de 3 Ă  4 jours s’échelonneront dans le courant de l’annĂ©e avec un sĂ©jour plus long Ă  l’étĂ© 2018. Pendant ces temps d’immersion, les enfants devront chercher « le grand secret du Lien » Ă  travers des activitĂ©s individuelles et collectives, et rendre compte de leur rencontre sensible avec la nature, en tĂ©moignant de leur expĂ©rience Ă  l’aide d’une camĂ©ra et d’une prise de son, pour produire un montage audiovisuel de 5 Ă  10 minutes.

Pour encadrer le projet, nous avons constituĂ© un Conseil de 5 sages, un parrainage de personnalitĂ©s emblĂ©matiques pour faire rĂȘver les enfants comme Pierre Rabhi, le chercheur et Ă©crivain Philippe Meirieu, le photographe Vincent Munier, la primatologue Emmanuelle Grundmann et la spĂ©cialiste des reptiles Françoise Serre Collet. Symboliquement, ils lanceront le dĂ©part du projet en octobre 2017, en ArdĂšche, non loin de la ferme de Pierre Rabhi oĂč tout le monde sera rĂ©uni. Plus concrĂštement, les enfants sont accompagnĂ©s dans leur pĂ©riple par des guides, des passeurs et des tĂ©moins qui se coordonnent ensemble. Les passeurs sont des Ă©ducateurs spĂ©cialisĂ©s en environnement, issus de toutes les structures partenaires. Les guides sont des pĂ©dagogues, spĂ©cialistes du sensible et de la pĂ©dagogie perceptive, qui aident les enfants Ă  prendre conscience et Ă  verbaliser l’expĂ©rience sensible ressentie et vĂ©cue. Les tĂ©moins, quant Ă  eux, aideront les groupes au montage et Ă  la communication audiovisuelle.

En quoi les activités de pleine nature sont-elles bénéfiques pour les enfants ?
Quand on donne Ă  l’enfant l’occasion de s’immerger dans la nature en allant Ă  son rythme et par lui-mĂȘme, on constate diffĂ©rents phĂ©nomĂšnes. D’abord, l’enfant reconnectĂ© Ă  lui-mĂȘme, reprend confiance en lui et acquiert beaucoup en autonomie. Cette responsabilisation individuelle lui permet ensuite de se positionner naturellement dans le groupe en prenant conscience de son appartenance Ă  un collectif. L’activitĂ© de pleine nature fait ainsi prendre conscience du lien solidaire qui lie l’individu au groupe, ce qui n’empĂȘche pas les conflits, mais oblige pour certaines activitĂ©s Ă  se coordonner et Ă  agir collectivement. Conscient de cette appartenance sociale, de son ancrage dans le groupe, l’enfant parvient enfin Ă  se positionner et Ă  rĂ©flĂ©chir sur sa place sur terre, Ă  prendre conscience du lien qui l’unit Ă  la nature. Les activitĂ©s de pleine nature dĂ©veloppent sans aucun doute des qualitĂ©s humaines nĂ©cessaires pour devenir un citoyen responsable. Le but n’est pas d’apprendre aux enfants Ă  protĂ©ger la nature, mais de les amener Ă  dĂ©velopper des qualitĂ©s qui leur permettront de protĂ©ger la nature. Cette reconnexion est indispensable aujourd’hui pour dĂ©velopper des attitudes Ă©coresponsables et former les Ă©co-citoyens de demain.

Plus d’infos sur : www.legrandsecretdulien.org

À LIRE : Enseignant trappeur, pourquoi pas ! Quand la nature rĂ©enchante l’école, de Philippe Nicolas. Éditions Le Souffle d’Or – 16 €
Dans ce livre passionnant, Philippe Nicolas, instituteur en banlieue parisienne, dĂ©voile ses mĂ©thodes d’apprentissage et sa pĂ©dagogie philosophe inspirĂ©e de son expĂ©rience de pĂȘcheur Ă  la mouche et d’amoureux des grands espaces canadiens.
«Que mon Ɠuvre d’école soit garante de la biodiversité». En Ă©cho au projet de FrĂ©dĂ©ric PlĂ©nard, voilĂ  douze ans que Philippe Nicolas applique sa mĂ©thode, inspirĂ©e de son expĂ©rience de trappeur, dans ses classes, un terreau fertile pour faire germer le lien Ă  la nature, Ă©lever les consciences, en dĂ©veloppant l’esprit critique et l’estime de soi.

Pour lire la suite

Déjà abonné·e, connectez-vous !

Magazine

À lire aussi

PrĂ©parer une agriculture solidaire pour l’avenir

Depuis plus de 10 ans, la coopĂ©rative Les Champs des Possibles, crĂ©Ă©e en 2009 Ă  l’initiative du rĂ©seau des AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) d’Île-de-France, Ɠuvre pour favoriser l’installation d’activitĂ©s agricoles et rurales au niveau local, en militant pour le dĂ©veloppement de l’agriculture biologique en circuits courts. Elle fĂ©dĂšre consommateurs, producteurs, commerçants, artisans, collectivitĂ©s, et invite Ă  repenser concrĂštement les schĂ©mas agricoles de demain.

Profs en transition

Les jeunes ne sont pas les seuls Ă  avoir entendu l’appel de Greta Thunberg. Face Ă  la crise climatique, un rĂ©seau s’est mis en place pour fĂ©dĂ©rer tous les acteurs de l’éducation et ouvrir les perspectives pĂ©dagogiques autour d’une Ă©cole plus responsable qui prĂ©pare les Ă©lĂšves aux enjeux environnementaux et sociaux de l’avenir. Rencontre avec un des cofondateurs de « Profs en transition ».