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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

La Finlande, temple ancestral de la santé

Si la médecine traditionnelle chinoise est connue et reconnue dans le monde, celle issue de Finlande le mériterait aussi. Les techniques et traitements qui la composent permettent une approche alternative pour grand nombre de pathologies. Nous sommes allées à la rencontre de ces soigneurs et soigneuses du nord de l’Europe, où la forêt et le sauna sont des temples de la santé.

Au bout d’une route, perdue au milieu d’un paysage vallonné et entourée de forêts profondes, se trouve la commune d’Hollola, à environ deux heures de la capitale Helsinki. C’est sur son lieu de travail que Maaria Alèn nous a donné rendez-vous. Nouvelle présidente de l’Association des soigneurs finlandais (fondée en 1996, elle réunit aujourd’hui 80 membres), elle opère son savoir-faire dans un savusauna, c’est-à-dire un sauna traditionnel.

LE SAVUSAUNA
Sa particularité ? Il n’a pas de cheminée. «Lorsqu’on le chauffe, la fumée reste à l’intérieur, explique-t-elle. Les murs sont noirs, à cause des cendres. Quand la température souhaitée est obtenue, on ouvre la porte et le räppänä, une petite fenêtre située sur l’une des parois, et la fumée s’en va. On peut alors l’utiliser.»
Maaria Alèn a choisi cet endroit «parce que c’est le lieu où elle a trouvé qui elle était».

Le sauna est au centre de toutes les méthodes des soigneurs en Finlande, même si certaines pratiques sont maintenant réalisées à l’extérieur, comme les massages. «Je voulais apprendre comment travailler avec la chaleur et j’ai commencé avec le whisking (le fait de se fouetter avec des branches de buissons et de plantes, NDLR). Petit à petit, j’ai été de plus en plus intéressée par les méthodes anciennes : comment travailler avec la nature, les plantes, avec les mains
Depuis presque six ans, Maaria Alèn est devenue praticienne, mais pas à temps plein puisqu’elle est également professeure. «Je pense que personne n’est soigneur pour l’argent. Vous ne pouvez pas vraiment vous enrichir avec la médecine traditionnelle : sinon, le karma vous rattrape !»

RAMENER L’ÂME DU SAUNA
La Finlande compte plus de 3 millions de saunas pour près de 5,5 millions d’habitants. Maaria Alèn souhaite lui rendre son âme et son statut spirituel : «Tout se passait dans ce lieu, où on se purifiait, où les gens communiquaient avec les Anciens, c’était une sorte de temple. Aujourd’hui, les gens y vont pour quinze minutes et s’en vont. Non ! Ça ne marche pas comme ça. On doit honorer le sauna et le löulu (l’eau qu’on jette sur les pierres chaudes pour faire augmenter la température dans le sauna, NDLR). Le sauna fait partie intégrante des pratiques ancestrales
Les Finlandais naissaient dans cet endroit qui était le plus hygiénique de la maison, y cuisinaient, travaillaient, y étaient soignés… C’est là que les corps étaient nettoyés après le décès. De la naissance à la mort, le sauna est un lieu de magie, où l’on partage des moments en famille ou entre amis.

Généralement, les séances commencent par une conversation avec la personne venue se faire soigner. Il s’agit pour la ou le soigneur d’identifier les points de souffrance, qu’ils soient physiques ou psychologiques. Selon les traitements, s’ensuit un passage au sauna, dans lequel on prend son temps, on se recentre sur soi-même, en silence, pour s’arrêter un instant. Il est alors possible d’enchaîner avec du cupping (voir ci-dessous) ou du whisking. Le whisking, rappelons-le, consiste à se fouetter (ou être fouetté-e) par la ou le soigneur à l’aide d’un bouquet de branches cueillies dans la forêt environnante (généralement du bouleau, de l’eucalyptus et du chêne) pour une sorte de massage favorable à une meilleure circulation sanguine, nettoyant la peau et la rendant plus saine. En plus de ces bienfaits, les senteurs qui s’en dégagent ajoutent un effet d’aromathérapie.

SE PURIFIER GRÂCE AU CUPPING
Le cupping est un cousin des ventouses chinoises, sauf qu’on fait des petites coupures dans la peau avant de les poser pour aspirer le sang. Il est réservé aux adultes. La Finlande est l’un des rares pays dans le monde à poursuivre ce traitement. Les bénéfices seraient nombreux et permettraient parfois d’éviter ou de réduire certains médicaments : «Ça purifie le corps, aide les muscles à récupérer, c’est bon pour la circulation, en cas de maux de tête, pour les soucis hormonaux, par exemple après la ménopause, ou encore les maladies de peau comme l’acné. On retire ce que les Anciens appelaient  “le mauvais sang” et les impuretés qui sont dans notre corps. Chez les Chinois, le sang est aspiré mais n’est pas retiré et ça laisse un  “bleu”. Ici, on le sort et on détoxe celui qui reste. C’est très puissant et efficace.»
Il faut normalement le faire deux fois par an avec une quantité de sang prélevée équivalente, au maximum, à celle d’une prise de sang. Quelques contre-indications tout de même : il ne faut pas le faire en cas de prise de médicament fluidifiant le sang, de diabète élevé ou de problèmes de cœur. Ce n’est pas non plus pour les femmes enceintes. «En gros, si vous pouvez aller dans le sauna, alors vous pouvez aussi faire du cupping.»

ÉTHIQUE ET TRADITIONS
Si les “cuppers” sont surtout des femmes et les “bonesetters” (méthode de massage avec manipulation de la colonne vertébrale) surtout des hommes, les soigneurs sont mixtes. Déjà dans le Kalevala, l’épopée nationale, on apprend que le premier sauna fut allumé par un homme et une femme ensemble. «C’est une coopération entre les deux, fait remarquer Maaria. Ces poèmes contiennent de nombreuses informations sur la médecine traditionnelle.» Transmises à l’oral durant des siècles, ces runes anciennes ont été compilées au XIXe siècle. Les premiers soigneurs, les “shamans”, étaient des hommes et des femmes très puissants, leaders de leur communauté. On dit d’eux qu’ils avaient la capacité de soigner ou encore d’arrêter les saignements rien qu’avec des mots. La pratique a évolué, mais n’a jamais disparu.
«Même quand la Finlande a été modernisée, après les guerres mondiales, la médecine traditionnelle est restée vivante, explique Maaria. Elle a changé avec la société, mais les racines sont toujours dans les traditions. Avec le cupping, on s’adapte aux normes d’aujourd’hui, mais la procédure date du Moyen-Âge. Le bonesetting idem. Même si de nombreux Finlandais apprennent de façon “standardisée”, ils ajustent et modifient leurs méthodes dans la pratique

En Finlande, les médecines alternatives ou complémentaires ne sont pas encadrées par des législations particulières, même si ces questions sont en débat depuis dix ans. Mais un code éthique strict est respecté par cette communauté. Les tarifs ne sont pas élevés. Pour Maaria Alèn, comptez 90 euros pour une séance d’une heure trente minutes de cupping (sauna, équipement à stériliser, nourriture, serviette, etc., taxes incluses) ; 65 euros pour un massage de la même durée ; de 50 à 65 euros pour un whisking.

«J’ai remarqué qu’il y a dix ans, les gens voulaient tester les techniques ayurvédiques ou chinoises, pensant : plus c’est loin, mieux c’est. Aujourd’hui, ils redécouvrent la médecine d’ici, se réjouit Maaria Alèn. Les Finlandais sont très modestes, ils disent toujours qu’ils n’ont rien de spécial, qu’ils sont juste sortis des bois il y a 1500 ans, mais on est la plus grande nation de saunas au monde ! On devient fiers de notre propre culture et il était temps !»

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