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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Mes premiers moutons

Épisode 1 : les préparatifs

Sur un grand terrain, en Seine-et-Marne, avec deux chats, des poules et des abeilles, j’ai décidé, cette année, d’installer deux brebis pour entretenir la prairie autour de ma maison. Les agnelles naîtront à la fin du mois d’avril. En attendant, je me prépare à l’aventure : quels sont mes prérequis ?

J’ai grandi à Paris entre deux étages en vis-à-vis d’une rue étroite du XVIIIe arrondissement. Dès que l’opportunité s’est présentée, j’ai déserté. Je vis maintenant depuis deux ans dans une maison du bord de la Seine, avec mon compagnon, un loyer modeste, mais en contrepartie deux hectares de terrain à entretenir. Anthropologiquement parlant, je dois être un cas d’école, un spécimen caractéristique d’exilé urbain. Ma mère, quand j’ai emménagé, m’a offert ironiquement le truculent Comment traire une poule ? de Marie et Hubert Deveaux. Ce petit livre dresse avec humour des portraits sociologiques de citadins qui partent vivre à la campagne, et ouvre l’éventail des modes de vie en milieu rural, de la routine pavillonnaire jusqu’à l’idéal baba cool. Ces catégories, pour être drôles, sont caricaturales, et j’espère, en confrontant mon témoignage, dépasser ces clichés. Quitter la capitale, c’était pour moi jouer avec de nouvelles cartes, à la fois une chance et un choix. Je n’ai jamais eu la prétention de devenir fermière, même si j’aspire à ma manière au « retour à la terre », à mon échelle, en composant raisonnablement sur mon temps libre, sans en faire mon métier.

UN CONTRAT DE SÉDENTARITÉ
À notre arrivée, près d’un hectare du terrain autour de la maison avait été laissé à l’abandon depuis une dizaine d’années. Le bois colonisait la prairie, surtout en aubépines, en églantiers et en ronces. Il aura fallu près d’une saison pour conquérir sur la broussaille à la machine. Un travail fatiguant pour les bras qui soulève la question de l’impact sur l’écosystème, d’autant qu’au printemps suivant, il fallait recommencer. Les animaux sont devenus une évidence. Sans polluer, ils dévoreront les jeunes pousses à venir, contenant le bois, tout en produisant une fumure utile au potager. En déléguant ainsi cette charge, je n’ai qu’à m’assurer des bonnes conditions de vie de mes assistants car (faut-il le rappeler) à la différence d’une machine qui, bien nettoyée, dormirait sagement dans un garage quand on part en vacances, l’animal continue d’exister. Il faudra donc trouver quelqu’un pour s’en occuper en cas d’absence.

Pour nous, les  moutons s’inscrivent assurément dans une logique de sédentarisation. Une brebis qui n’a pas d’agneau peut vivre une quinzaine d’années. Faire un potager, même modeste, impose un rythme régulier, un poulailler nécessite une maintenance et les chats se nourrissent tous les jours. Nous sommes en quelque sorte déjà assignés à domicile, et même si les brebis  demandent peu d’attention, elles exigent une surveillance continue de leur confort, leur alimentation et leur santé. De plus, près du fleuve, l’humidité favorise malheureusement certaines maladies.

CHÈVRES OU MOUTONS ?
Remis au goût du jour par les projets d’éco-pastoralisme et le slogan efficace des « moutons-tondeurs », l’élevage des moutons n’a rien d’une nouvelle mode, puisqu’il s’agit d’une des plus vieilles activités humaines (près de 10 000 ans). Les races sont elles-mêmes tributaires des croisements nés de cette domestication. Néanmoins, la fragmentation des espaces et la réduction des zones de pâturage ont considérablement réduit ces habitudes ancestrales.

Pour nous, les ovins s’imposent par la taille. Dans les deux cas (chèvres ou moutons), comme nous ne disposons pas de rochers ni de surface abrasive pour leurs sabots, nous devrons couper les onglons régulièrement. Pour les moutons, il faudra en plus tondre la laine, qu’il est presque impossible de vendre en tant que particulier.  Je n’ai jamais pratiqué, j’apprendrai. Je choisis les moutons pour leur facilité d’élevage contre la turbulence réputée des chèvres, car je voudrais aussi préserver les arbres fruitiers de mon terrain.

UN ENVIRONNEMENT POUR DES ANIMAUX RUSTIQUES
Nous disposons d’environ un hectare de pâture. Le nombre de brebis à l’hectare dépend de la capacité nutritive pour la surface désignée. Sur un parking, il est difficile d’élever des brebis. Certaines parcelles forestières, blague à part, ne représentent pas forcément davantage en nourriture. En prairie, plus l’herbe est riche, plus l’élevage pourra s’intensifier. Cependant, je n’élève pas des moutons pour les manger. L’objectif pour nous est d’abord de nourrir les animaux de l’herbe disponible pour qu’ils assurent l’entretien de la prairie et d’éviter, dans l’absolu, le recours au foin en complément alimentaire.

Comme au potager, en cloisonnant les espaces, une rotation s’organisera, à la manière d’« une mini-transhumance » pour faire repousser l’herbe et laisser les fleurs s’épanouir au printemps à proximité des abeilles. Je prévois ainsi un enclos permanent et grillagé avec un abri pour l’hiver. Les brebis « transhumeront » ensuite à travers le terrain pendant la période chaude.

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