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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Sans nom

Femme en exil

En préparant l’article de ce numéro, j’hésitais sur le sujet : intestin ou ayurveda… Et puis, finalement, ce ne sera ni l’un ni l’autre. Parce que l’actualité m’oblige à vous parler simplement d’humanité.

Je vis à Nice, une ville frontière, une ville de migration, une ville où se côtoient de nombreux égoïstes et de vraies personnes solidaires, justes.

Nice est une ville de passage pour de nombreux migrants. Dans ces circuits empruntés, sur ce chemin de l’exil, les femmes sont nombreuses : elles représentent plus de la moitié (51 %) des flux migratoires de la planète*, même si elles sont pour la plupart invisibles. Ces femmes, victimes de violences plus encore que les hommes, se battent, en Europe, contre une politique et des pratiques administratives qui imposent des conditions difficiles à celles qui demandent de l’aide.

L’expérience de « SANS NOM », jeune femme guinéenne, est un exemple fort. Je l’appelle SANS NOM, car elle est en danger. SANS NOM a fui la Guinée où elle a été excisée, mariée de force avec un commerçant de 76 ans, violée par cet homme, violentée. Avant ce mariage, grâce au soutien de ses professeurs, de sa tante et de sa mère, elle avait pourtant réussi à continuer ses études. Elle avait validé sa maîtrise de Mathématiques appliquées et suivi une formation en informatique. Elle était déterminée à s’instruire : « Je voulais être une femme qui réfléchit » dit-elle. Mais non. Son père, effrayé par la détermination de sa fille, a décidé d’intervenir « pour l’honneur de la famille ». Un soir, rentrant chez elle, elle se retrouve au milieu d’une cérémonie. Surprise, elle arrive au milieu d’une fête qui n’est autre que son mariage. Son père ne lui laisse aucun choix : « C’est moi qui décide, toi tu obéis. »

Son mari, commerçant de 76 ans, a déjà deux femmes. Elle est violée par cet homme dès la première nuit, puis traitée comme l’esclave de la maison, battue, torturée quand elle ne se soumet pas. Elle découvre que les rituels familiaux de son pays le dominent telle une forteresse. Épuisée par la violence quotidienne, elle ne baisse pourtant pas les bras et sa volonté de s’émanciper lui donne la force d’envisager de passer les frontières : « Aller assez loin pour qu’ils ne puissent plus me toucher » et « trouver un pays qui respecte les droits des femmes ».

Elle veut venir en France, car elle est francophone et elle pense que, dans ce pays, elle sera protégée et soignée. Elle ne sait pas encore de quoi est jalonné le parcours de l’exil quand on est une femme. SANS NOM a eu le courage de fuir le cauchemar pour venir en France et traversé des épreuves qu’elle n’aurait pas imaginées : violence, viol et torture parsèment le chemin.
Mais elle avance, persuadée qu’au bout de la route se trouve un refuge dans lequel son corps blessé sera libre et protégé. Pourtant, sa demande d’asile est refusée. Elle est déboutée, car elle ne peut pas prouver toutes les violences qu’elle a subies. Les persécutions dont les femmes sont victimes sont souvent difficiles à prouver.

Nous sommes là…

SANS NOM est en danger d’extradition vers la Guinée. Comment renvoyer cette jeune femme dans un pays où l’absence de protection de l’État est évidente ? De ce qu’elle a vécu jusque-là, elle dit : « Tout cela me tue dans mon corps. Je ne veux pas en parler. Je veux passer à autre chose. » Elle a besoin de se poser pour supporter le passé. Elle a besoin de se sentir libre et protégée pour envisager l’avenir. Mais elle est dans une situation de non-droit. Elle n’a même pas de nom. Mais elle n’est pas seule. Autour d’elle, nous réfléchissons au moyen de faire revenir les autorités sur leur décision.

Bientôt, nous allons lancer une campagne de soutien, pour elle et pour d’autres femmes qui ont besoin de la même protection.
Je vous tiendrai au courant !

* Selon les dernières données disponibles, rendues publiques par la Division de la population des ONU en 2010.

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