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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Milly-la-Forêt

Au pays de la menthe endormie

Si la menthe poivrée a fait la réputation de Milly-la-Forêt pendant près d’un siècle, il ne reste plus qu’un seul producteur, aujourd'hui, dans la région, sans compter la société Darbonne-Darégal, devenue leader mondial des plantes aromatiques surgelées, l’héritier d’une dynastie de cultivateurs-herboristes.

Le Conservatoire National des Plantes à parfum, Médicinales, Aromatiques et Industrielles (CNPMAI) témoigne encore de cette vocation. Centre technique et scientifique tourné vers les professionnels, le lieu est ouvert au public. L’ancien séchoir et les jardins offrent une visite idéale pour s’initier au monde végétal et découvrir l’histoire de Milly où la menthe sommeille.
Au cœur du Parc naturel du Gâtinais, dans la vallée de l’École et en bordure de la forêt de Fontainebleau, le passé s’accroche aux vieilles pierres du village de Milly-la-Forêt, où les greniers et les anciens séchoirs témoignent d’une activité ancienne à laquelle les laboratoires Eona, producteurs d’huiles essentielles, font écho. Les rues pavées convergent au centre, vers la grande halle du XVe siècle sur la place du marché. C’est là que le premier week-end du mois de juin, depuis vingt ans, se déroule le Marché de l’Herboriste, prévu cette année du 5 au 6 juin 2016. La manifestation a gagné sa réputation en renouant avec le souvenir des grandes halles du début des années 1920, quand Milly était un centre incontournable pour les plantes aromatiques et médicinales. L’héritage survit. Autour de la place, deux échoppes perpétuent toute l’année cette tradition : la plus ancienne, l’herboristerie Milly Menthe a été fondée en 1934. Juste en face, à l’herbier de Milly, la sœur du dernier producteur de menthe poivrée des environs, Catherine Bosc-Bierne, tient boutique, proposant ses sirops, ses liqueurs et ses bonbons, mais également des produits et des légumes locaux et bio.

MILLY-LES-MENTHES
Les vertus de la menthe poivrée sont innombrables, plante aromatique et médicinale, on en trouve à peu près partout. N’essayez toutefois pas de la semer, c’est un hybride stérile issu d’un croisement entre une menthe douce et une menthe aquatique, qui se multiplie uniquement par clonage, en bouturage ou en division des touffes. L’origine de cette hybridation est méconnue, elle se répand dans toute l’Europe et l’Amérique du Nord à partir du XIXe siècle.
À Milly, à l’origine, on cultivait exclusivement une menthe poivrée blanche, baptisée L’ancienne Milly ou Milly.
Dans les années 1920, la variété Mitcham, une menthe poivrée noire, originaire d’Angleterre, s’impose dans toute l’Europe. Elle supplante L’ancienne Milly, devenue trop sensible aux parasites, et dont la culture est définitivement abandonnée au cours des années 1940.

INDUSTRIALISATION ET DÉCLIN
La production des plantes médicinales connaît son apogée à Milly dans la première moitié du XXe siècle. Avec un peu plus d’une centaine de producteurs et une centaine d’hectares cultivés en 1945, les années d’après guerre amorcent une crise profonde, que la construction d’une distillerie en 1947 ne pallie pas. Face à la mondialisation et la concurrence étrangère, à l’apparition des produits de synthèse et la fluctuation des cours, l’activité est presque rayée de la carte en quelques décennies. La crise frappe d’abord les petits producteurs qui disparaissent dans les années 1960. Seuls résistent ceux capables d’assumer une reconversion industrielle.

Dans les années 1960, Marc Darbonne abandonne les plantes médicinales pour se spécialiser dans les aromatiques et se lance dans les procédés de déshydratation. La société Darbonne-Darégal est désormais un leader sur le marché mondial des plantes aromatiques surgelées, notamment l’estragon. La destinée des Darbonne est exceptionnelle.
Une poignée d’autres cultivateurs-herboristes ont poursuivi l’activité jusque dans les années 1980, mais le décret de non-remboursement des médicaments à base de plantes médicinales dans le cadre de la loi Evin de 1989 assène le coup de grâce, d’autant que ces cultivateurs-herboristes ne profitent pas de la PAC. La jeunesse locale déserte les champs pour l’usine.

À LIRE :
Histoires de plantes et mémoires d’hommes. Rencontre avec les cultivateurs-herboristes de la région de Milly-la-Forêt, de Y. Le Chaudelec & A. Moreau & C. Estrade. Éditions CNPMAI, 160 pages, 25 €
PLUS D’INFOS :
Conservatoire National des Plantes à parfum, Médicinales, Aromatiques et Industrielles, Route de Nemours, 91490 Milly-la-Forêt. Tél. 01 64 98 83 77. Site internet : www.cnpmai.net
Ouvert d’avril à juin : fermé le lundi, ouvert le mardi, le jeudi et le vendredi de 13 h 30 à 18 h, le mercredi et le week-end de 10 h à 18 h.

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