La peau, autre victime de la pollution

Tous les jours, et même dans l’intérieur de nos maisons, la peau est exposée à la pollution environnante. On en connaît maintenant les conséquences sur son équilibre… et les façons de s’en protéger.

Ce n’est pas un scoop : nous sommes tous, et par voie de conséquence notre peau aussi, exposés chaque jour à de multiples facteurs polluants. Il y a ceux que nous générons nous-mêmes : la fumée de nos cigarettes, l’utilisation de sprays d’intérieur ou même de bougies parfumées en est une source que l’on peut réduire en modifiant nos habitudes. Et puis il y a ceux contre lesquels on ne peut pas grand-chose : les gaz d’échappement des voitures, les métaux lourds et les particules fines rejetés dans l’air par les industries et les chauffages de nos appartements, l’ozone…

Notre peau est ainsi en permanence en but à tous ces facteurs conjugués, qui l’obligent à élaborer des systèmes de défense… parfois dépassés. Son équilibre est alors déstabilisé, et cela se voit : elle devient terne, s’assèche, vieillit…

Ce qui est nouveau, c’est que des études récentes ont pu analyser en détail et mesurer la façon dont la pollution perturbe la peau. Ce qui ouvre la porte à des solutions cosmétiques susceptibles de contrebalancer ses effets.

Preuves à l’appui

De nombreuses études ont ainsi montré que l’exposition à une atmosphère chargée en ozone et en polluants génère un stress oxydatif, se traduisant par une flambée de radicaux libres et une réduction du niveau des antioxydants cutanés.

Et des recherches à visée cosmétique avaient déjà mis en évidence, sur des cultures de cellules de peau humaine, l’impact fragilisant d’une atmosphère polluée sur les membranes cellulaires.

Devant ce constat, l’enjeu pour les marques cosmétiques était de mettre en évidence, et surtout de mesurer et d’objectiver les conséquences de la pollution sur la peau. Dans le but, bien sûr, de les prévenir ou de les corriger à l’aide de produits cosmétiques.

Mais cela demande beaucoup de techniques d’évaluation, notamment biophysiques et biochimiques, associées à des outils analytiques pour déterminer ce qui se passe à l’interface entre le monde extérieur et la peau, et notamment dans le stratum corneum, sa couche la plus superficielle et la plus accessible. Beaucoup de moyens et un gros budget, donc, ce qui n’est pas à la portée de toutes les marques… : on ne s’étonnera ainsi pas que ce soit le groupe L’Oréal qui ait pu mener de telles recherches, et publier des résultats qui pourront être utiles à tous les laboratoires en quête d’actifs anti-pollution, et au final, à toutes nos peaux.

Le parcours d’une recherche scientifique

Il aura fallu de nombreuses années, et quatre études, de Paris à Shanghai en passant par Mexico, pour arriver aux résultats présentés récemment par le grand groupe cosmétique.

L’étude préliminaire

Tout a commencé en 1998, avec un protocole des plus simples.

Un volontaire a accepté de faire l’expérience d’être, pendant une journée, exposé à la pollution parisienne. Il s’est promené dans les rues les plus fréquentées, est allé dans le métro… la moitié de son visage et un de ses bras protégés de façon à pouvoir faire la comparaison d’un certain nombre de paramètres cutanés entre la zone de la peau exposée et la zone non-exposée.

Grâce à cette expérience, les chercheurs ont pu collecter et évaluer l’ensemble des polluants contenus dans l’environnement et déposés sur la peau, et aussi mesurer certains paramètres biologiques, biophysiques et analytiques.

Ils ont ainsi pu constater de nombreuses différences entre les zones exposées et les zones protégées. Parmi elles : l’hydratation, le pH, la sécrétion de sébum, la vitamine E, le squalène…

Une étude avec un seul sujet est bien sûr peu probante, celle-ci a cependant permis de donner des indications qui ont orienté les suivantes.

L’étude pilote

Réalisée en 2000, elle suit un protocole beaucoup plus classique, avec deux populations distinctes (huit sujets en tout), dans deux lieux d’exposition différents durant deux jours : Paris encore, et Neauphle-le-Château, dont la région est peu soumise à de mauvaises conditions environnementales.

Les chercheurs ont mesuré les mêmes paramètres que ceux qui avaient été identifiés dans l’étude préliminaire.

Résultats : plusieurs paramètres ont été confirmés. Et notamment l’augmentation de la sécrétion de sébum, la mise en évidence de processus d’oxydation avec une diminution de la vitamine E et du squalène, une augmentation de l’acide lactique, ainsi qu’une diminution de la fonction barrière.

L’étude de Mexico

Toujours en 2000, le groupe L’Oréal décide de passer à une démarche de plus grande ampleur. Avec une cohorte de volontaires plus importante (189 sujets en tout) et l’intervention de dermatologues chargés de déterminer les manifestations dermatologiques qui peuvent être mises en évidence en complément des mesures biochimiques, biophysiques et analytiques.

96 sujets étaient à Mexico City, où les conditions environnementales sont très mauvaises, 93 à Cuernevaca, connue au Mexique sous le nom de ville de l’éternel printemps et où les conditions sont bien plus favorables.

Les résultats obtenus vont dans le même sens que ce qui avait été mis en évidence dans les précédentes études : l’excrétion du sébum est augmentée, le processus d’oxydation est très impacté, la fonction barrière est modifiée, l’hydratation diminue… Et l’évaluation clinique confirme ces résultats.

L’étude de Shangaï

Dernière étape en 2008 en Chine, où les conditions environnementales de certaines grandes villes chinoises sont critiques.

Cette nouvelle étude est menée avec 160 volontaires, dans la région de Shanghai, sur deux sites différents, l’un connaissant de mauvaises conditions environnementales, l’autre des conditions qualifiées « d’acceptables ».

Cette fois, un questionnaire est mis en place pour recueillir les impressions des personnes participant à l’étude, et voir s’il y a une corrélation entre ce qu’on observe sur le plan biophysique et analytique, et l’auto-évaluation individuelle des volontaires.

Et elle a permis de reconfirmer le phénomène d’oxydation et le processus de desquamation.

Les résultats

Pour résumer les principaux effets de la pollution sur la peau :

  • la production de sébum est augmentée, et sa composition est modifiée,
  • le processus d’oxydation est très impacté : diminution de la vitamine E et du squalène, augmentation des protéines oxydées,
  • la fonction barrière est affaiblie,
  • certains paramètres biochimiques sont modifiés…

Et tout cela a été constaté après de courtes expositions à de mauvaises conditions environnementales : une à deux journées suffisent pour voir les modifications de la peau !

Les réponses cosmétiques

Que conclure de ces résultats d’un point de vue pratique ? Trois armes peuvent prévenir les méfaits de la pollution et compenser ses effets sur la peau.

Le nettoyage

Il est bien sûr primordial de débarrasser la peau des résidus polluants. La cosmétique peut élaborer des produits plus efficaces et plus ciblés anti-poussières, anti-microparticules, etc. Reste aux consommateurs à les utiliser matin et soir, le matin contre les polluants intérieurs, le soir contre les polluants environnementaux « récoltés » tout au long de la journée.

La protection

« Sortez couverts ! », tel pourrait être le mot d’ordre pour éviter à la peau les contacts (trop) directs avec les polluants environnementaux. Côté formulations cosmétiques, cela passe par des produits spécifiques adaptés aux conditions environnementales, et riches en émollients pour restaurer et/ou améliorer la fonction barrière, de façon à éviter la pénétration d’un certain nombre d’agents polluants. Sans oublier la photoprotection, puisqu’on sait que l’exposition aux UV (A et B) potentialise les effets des polluants. Côté consommateurs, cela passe par l’application de ces soins adaptés chaque matin, sans exception.

La réparation

Il s’agit là d’avoir recours largement aux antioxydants, pour contrecarrer les processus d’oxydation… et la cosmétique ne manque pas de substances dotées de telles propriétés.

Voilà qui constitue un réel espoir de voir nos peaux moins souffrir de la pollution, et les marques cosmétiques devraient proposer de plus en plus de produits adaptés pour ce faire. En attendant un éventuel impact positif des décisions prises lors des réunions internationales, comme la dernière COP21 de Paris, sur les conditions climatiques et environnementales dans lesquelles nous vivons.

Gageons que sur ce point, les innovations cosmétiques seront plus rapides que les influences politiques…

Magazine

À lire aussi

Pollution aérienne

La pollution aérienne va continuer à miner notre santé malgré la parenthèse du confinement imposé par la pandémie de Covid-19. Les plus préoccupants des polluants aériens sont les particules fines et plus encore, les particules ultrafines, malheureusement non prises en compte dans le calcul de l’indice de la qualité de l’air. Sous l’effet de cette pollution, l’organisme subit un stress oxydatif contre lequel on peut l’aider à se défendre en consommant davantage d’aliments riches en antioxydants. Au besoin, un apport complémentaire en antioxydants peut être envisagé. 

La vague cosmétique anti-pollution

C’est LA tendance du moment : la cosmétique se fait fort de lutter contre les dommages causés à la peau par la pollution. Les plus grands laboratoires, fournisseurs d’ingrédients ou de produits, travaillent sur le sujet, et on ne compte plus les allégations qui fleurissent sur les étiquettes. Marketing ou innovation intéressante ?