Les chats et leur histoire
Cultures félines (XVIIIe-XXIe siècle)
Les chats créent leur histoire
Éric Baratay
Éditions du Seuil
336 pages
14 x 20 cm
23 €
Ebook 16,99 €
Pour en finir avec la figure du « Chat éternel », Éric Baratay invente une nouvelle discipline : l’eth(n)ologie historique des chats, qui conjugue l’éthologie et l’ethnologie, la biologie et les sciences sociales. En s’opposant à la conception des animaux comme « machine biologique », ce professeur à l’Université de Lyon, auteur de Biographies animales (2017), montre ici comment les chats ont évolué entre le XVIIIe siècle et aujourd’hui, en s’adaptant au changement des comportements des humains à leur égard. Autrement dit, les chats ont une histoire. Depuis le grand massacre à l’époque des procès en sorcellerie des XVIe et XVIIe siècles, les chats ont toujours eu leur utilité pour lutter contre les rongeurs dans les fermes ou les ateliers. Le chat errant, en revanche, était exterminé sans ménagement.
Certains recueillis en animaux de compagnie sont ensuite devenus compagnons et même « chatchiens » au début du XXIe siècle, s’attachant non plus à un territoire, mais à un humain, au point d’accepter d’être promenés en laisse. On est loin de l’image du chat romantique indépendant et indocile. Comment des chats haïs sont-ils devenus les animaux domestiques les plus appréciés ? Pour répondre à cette question, la forme de ce livre a de quoi surprendre. En jouant de la mise en page des paragraphes et de la typographie, les points de vue alternent les éléments donnés par le contexte historique ou les réflexions scientifiques, le récit des humains et la reconstitution du point de vue chat, pour retranscrire l’expression vivante des gestes. Ainsi les chats « tournoreillent », « palpinarinent », « aggriffent », « palpattent » ou « dépupillent ».
Saviez-vous que le terme « ronron » n’a été inventé qu’au XIXe siècle ? En s’affranchissant de considérations trop généralistes, l’historien eth(n)ologue s’appuie sur des individus pour étudier les variations des caractères à partir des récits transmis au fil des siècles par des propriétaires de chat. On y retrouve les chats de Paul Léautaud, Pierre Loti, Athénaïs Michelet, Marie Dormoy, Théophile Gautier ou Théodore de Banville, mais aussi l’histoire extraordinaire de Trim, le chat marin, mascotte embarquée sur les navires de la Royal Navy, ou encore de Dewey, le chat de la bibliothèque de Spencer dans l’Iowa à l’aube des années 2000. Cette approche révolutionnaire invite ainsi à se défaire de notre vision anthropocentrée.
Elle met en évidence une évolution dynamique où s’entremêlent les données biologiques, les facteurs environnementaux et une construction socio-culturelle interdépendante entre les animaux et les humains. Au-delà des chats, ces considérations prônent une nouvelle philosophie de la condition animale qui adopte le point de vue animal pour repenser notre lien au vivant.