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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Témoignage d’un centenaire

Un peu d’hérédité, de la “vraie nourriture”, un sommeil réparateur, de la gym pour le cerveau et beaucoup d’amour et d’amitié ! Louis Toussaint a fêté ses 100 ans au mois d’octobre. La similitude de nom n’est pas une coïncidence : Louis est mon grand-père. Avec son œil pétillant, son esprit alerte et son amour de la vie, personne ne pourrait deviner son âge. Pourtant, il avait déjà 32 ans lors de la seconde guerre.

Murielle : Tu viens de fêter ton centenaire. Comment te sens-tu ?
Louis : Pas mal. Je dois dire que ça va même plutôt bien.

Tu es près pour un second round ?
Oui, si possible en tout cas. Je ne peux rien dire d’autre pour le moment. Mais j’aimerais bien. Je veux bien continuer. Si rien ne change, si ma santé reste bonne comme elle l’est encore maintenant, mon Dieu, tant mieux, allons-y !
J’ai eu une vie heureuse. Pourtant, il y a eu des moments difficiles, comme la perte de mon frère, qui fut un coup terrible pour moi. Puis, j’ai eu un grave accident de moto pendant la guerre, qui m’a obligé à changer de profession. J’étais vétérinaire de campagne. J’avais été appelé pour une fièvre de lait et, comme les Allemands ne me donnaient pas suffisamment d’essence pour me permettre d’effectuer en voiture tous les déplacements que je devais faire pour mon métier, j’avais été contraint de me déplacer en moto. Comme je ne possédais pas de permis, j’ai pris peur en voyant approcher une patrouille allemande. J’ai accéléré et j’ai eu cet accident. Ma colonne vertébrale a été touchée et j’ai été obligé d’abandonner la pratique vétérinaire pour travailler à l’inspection vétérinaire pour l’armée. Avec le recul, je pense que c’est en partie grâce à cela que je suis encore en vie. J’ai eu une vie beaucoup moins fatigante que si j’étais resté vétérinaire à la campagne, travaillant plus la nuit que le jour. En effet, les accouchements, notamment bovins, se font principalement la nuit. Ensuite, lorsqu’on se couche à 7 h du matin, on prie pour qu’on vous laisse dormir, puis le téléphone re-sonne. C’est une vie magnifique, mais exténuante. J’ai regretté pendant des années de ne plus pouvoir exercer mon métier mais, aujourd’hui, je me dis que c’était une bonne chose. D’autant plus que je me suis rétabli quasi sans séquelles. Je devais avoir une bonne constitution !

Tu n’as jamais fait beaucoup de sport, ni mangé ce que la nutrition officielle qualifie de “diététiquement correct”. Alors, à ton avis, quel est le secret de ta forme et de ta longévité ?
Mon caractère un peu spécial… J’ai toujours été très nerveux, mais cette nervosité ne me rongeait pas. Je n’ai jamais souffert gravement pendant très longtemps. Je m’explique : si quelque chose me faisait du mal, cela ne durait pas longtemps. J’oubliais tout très vite. Si quelque chose m’avait indisposé, une querelle avec ma femme par exemple, j’explosais, mais j’étais vite calmé et j’étais le premier à revenir vers elle ensuite. Et c’était la même chose avec un client, un collègue, etc. J’arrive très vite à relativiser les choses et je crois que c’est cela qui m’a sauvé car, nerveux comme je le suis, comme je l’ai toujours été, je n’ai jamais accumulé le stress à l’intérieur. Je ne suis jamais resté sans dormir à cause du fait que je m’étais querellé avec quelqu’un la veille.  
Je n’ai jamais non plus été un buveur. Pour être honnête, à certaines grandes occasions, ma femme trouvait que je buvais un peu trop, mais il faut croire que je supportais bien l’alcool, car je n’ai jamais été saoul. J’ai toujours apprécié un bon vin, mais sans excès. Et puis, j’aime énormément la vie !

Tu as aussi arrêté de fumer du jour au lendemain.
Oui, tu avais trois ans à l’époque. Fais le compte… Nous nous promenions et tu cueillais des marguerites pour ta grand-mère. J’ai sorti mon paquet de cigarettes, j’en ai allumé une et tu m’as dit : « Tu vas encore fumer Bon-Papa ? ».  « Oui, je fume toujours, pourquoi ? Tu m’aimerais plus si je ne fumais plus ? »  Tu m’as répondu : « Oui, je t’aimerais encore plus. »  Quelqu’un est passé et je l’ai interpellé : « Vous êtes fumeur, Monsieur ? »  « Oui », m’a-t-il répondu. Je lui ai tendu mon paquet de cigarettes et mon briquet en disant : « Tenez, c’est pour vous. » Et je n’ai plus jamais touché une cigarette depuis. Merci  ! Si je suis encore en vie, c’est en partie grâce à toi.

Que fais-tu pour entretenir ta mémoire ?
Après la mort de ma femme, je me suis demandé ce que j’allais devenir. Puis un ami m’a dit : « Je vais jouer au bridge cet après-midi. Viens avec moi» . Je lui ai dit : « Mais je ne sais plus jouer au bridge ». Il m’a répondu : « Mais si, tu sais toujours jouer, j’en suis certain ! » Je l’ai donc accompagné et j’ai vite été considéré comme l’un des meilleurs joueurs. C’est donc grâce à cet ami et à ma famille qui m’a encouragé dans cette voie que je me suis remis au bridge. C’était il y a 8 ans et je joue toujours plusieurs fois par semaine. Les gens sont impressionnés par ma faculté à retenir toutes les cartes qui sont sorties. Je suis donc toujours joueur de cartes et j’aime ça ! Le bridge entretient ma mémoire, mais je dois dire que j’ai aussi énormément d’amis et d’amies. Je suis invité à aller jouer chez certains d’entre eux, d’autres m’apportent de la soupe ou de la tarte… Si je jouais seulement aux cartes sans avoir tous ces amis, je ne resterais probablement pas dans mon appartement. Mais je ne me sens jamais seul. Une voisine me téléphone tous les jours et m’invite régulièrement à boire un café. Il y a tout le temps quelqu’un qui m’appelle, m’invite ou vient me voir. Je suis heureux ! Avant de commencer le bridge, je faisais tous les mots croisés jusqu’au niveau 4. De temps en temps, j’avais besoin du dictionnaire pour finir le niveau 4, mais je n’abandonnais jamais sans l’avoir terminé. Depuis que je joue au bridge, j’ai abandonné les mots croisés, mais je lis chaque jour le journal de la première à la dernière page. La crise financière actuelle, je la suis de plus près que des tas d’autres.

Ta sœur a vécu jusqu’à 97 ans. Est-ce qu’il y a d’autres membres de la famille qui ont une telle longévité ?
La mère de ma femme a vécu jusqu’à 94 ans et a eu 2 sœurs qui ont dépassé 95 ans. De ce côté-là, il n’y a pourtant pas de lien génétique. Par contre, de mon côté, les frères et sœurs de mon père ont tous vécu au-delà des 85 ans. Tante Flore, par exemple, est morte à 99 ans, tante Marthe à 94 ans.

Tu penses donc qu’il y a un petit facteur génétique  ?
Oui, je pense qu’il y a un facteur génétique du côté de mon père.

Tu dors aussi relativement bien ?
Oui, en effet, je dors très bien. Il me faut 7 ou 8 heures de sommeil par nuit. Si je dors 8 heures, je suis bien. Une fois que je m’endors, je suis parti d’une traite pour toute la nuit. J’ai un sommeil profond. Je mets en général une demi-heure pour m’endormir mais, une fois dans les bras de Morphée, je suis parti pour 7 ou 8 heures de sommeil d’affilée. Je fais aussi toujours une sieste après le repas, où que je sois. Quand je vais jouer au bridge au centre communautaire, les autres recommencent à jouer immédiatement après le repas. Quant à moi, je m’installe dans un fauteuil et je dors une dizaine de minutes, jamais plus d’une demi-heure, et je me réveille reposé.

Dans ta jeunesse, tu as longtemps vécu à la campagne ?
Oui, tout le temps jusqu’à mes études de vétérinaire.

Et que mangeais-tu ?
Nous avions un potager énorme. Pendant les vacances, je travaillais beaucoup dans le jardin. Il y avait de tout : des groseilles, des cerises, des pommes, des pêches, toutes les sortes de légumes… C’était un potager de plusieurs hectares.  Je mangeais 2 repas chauds par jour et nous mangions de “vrais aliments”, jamais de conserves, de plats préparés et autres plasti-aliments et, bien entendu, pas de grignotage. Même pendant mes études vétérinaires, je vivais chez une cousine dont les parents étaient fermiers. Les légumes venaient du potager, ils cultivaient le blé. À la maison, ma mère faisait le pain elle-même. Je me souviens que, lorsque le pain avait chauffé, on glissait les tartes dans le four chaud juste à point. Ma femme était aussi une excellente cuisinière. Elle savait ce que j’aimais. Elle n’a jamais voulu me gâter trop, mais elle m’a toujours cuisiné de bons petits plats avec des produits frais et a toujours bien pris soin de moi sur tous les plans. Et cela aussi c’est terriblement important ! Tout le temps que je suis resté immobilisé après mon accident de moto, ma femme est venue chaque jour m’apporter soit du bouillon maison, soit du lait en provenance de la ferme. Elle payait un fermier pour la conduire, passait la journée à mes côtés, puis rentrait en train. C’est ce qui m’a permis de reprendre peu à peu des forces et de me rétablir.

Et que penses-tu du monde actuel par rapport au siècle passé ?
L’internet est un outil formidable, mais il me fait peur. Je le ressens un peu comme une menace pour la vie privée, sans parler des risques de fraudes. Je préfère donc rester éloigné de cet outil. Par contre, je suis en admiration devant les progrès qu’ont faits la médecine et la chirurgie. C’est épatant !
Dans le temps, il existait aussi de nombreuses rivalités et jalousies au sein des villages. Les cancans et les ragots allaient bon train. Il y avait une bonne dose d’hypocrisie. Aujourd’hui, les gens sont moins étroits d’esprit. Il y avait deux classes bien distinctes à l’époque : ceux qui avaient fait des études et les autres. Aujourd’hui, tout le monde a sa chance et je trouve cela merveilleux.

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In vino veritas* : on connaît tous le vieux proverbe, mais que savons-nous vraiment du vin ? Catherine Bernard est vigneronne dans le Languedoc où elle produit des vins naturels. Dans ses livres, elle raconte ses travaux des vignes et questionne la part culturelle et philosophique de ce que nous buvons. Une initiation au vin qui passe du ciel à la terre, de la vigne au raisin, de la cuve à la table.

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