communauteSans
Communauté
boutiqueSans
Boutique
Image décorative. En cliquant dessus, on découvre les différents abonnements proposés par Rebelle-Santé
S’ABONNER

La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Trouble Obsessionnel Compulsif (TOC)

Un terme abstrait qui désigne une maladie bien réelle…

Se laver les mains 40 fois par jour, compter systématiquement les plaques d’immatriculation des voitures, être incapable de se débarrasser d’objets inutiles… Ces étranges manies concernent 2 à 3 % de la population.

Article écrit par Alix Leduc

Autrefois appelés “névroses obsessionnelles”, ces troubles entrent, désormais, dans la catégorie des TOC (troubles obsessionnels compulsifs). Ils touchent aussi bien les adultes que les enfants, les hommes que les femmes, et sont présents aux quatre coins de la planète.
Cette maladie encore trop méconnue est pourtant bien réelle pour ces personnes dont la vie ressemble souvent à un cauchemar. Sentiment de honte, peur d’être assimilés à des “fous”, ils sont nombreux à taire leur mal-être et à “faire avec”, malgré la souffrance. Pourtant, les spécialistes sont formels : plus le TOC est diagnostiqué tôt, plus on a de chances de le réduire et d’éviter l’engrenage : aggravation de la maladie, nuisances parfois extrêmes sur la vie privée et sociale…

QU’EST-CE QUE LE TOC ?
Le TOC (trouble obsessionnel compulsif) est une maladie anxieuse assez sévère, marquée par deux symptômes : l’obsession et la compulsion.
La personne souffre d’idées fixes qui deviennent envahissantes, angoissantes et tyranniques.

À PARTIR DE QUAND PEUT-ON PARLER DE TOC ?
La grande différence entre une manie “normale” et un TOC réside dans la capacité à réprimer la pensée obsédante. Même si elle a conscience de l’absurdité de son comportement, la personne atteinte d’un TOC se sent obligée d’adopter un rituel. C’est plus fort qu’elle.

QUELLES SONT LES ORIGINES DU TOC ?
Les causes du TOC sont encore mystérieuses. Comme dans la plupart des troubles psychiques, les origines seraient multi-factorielles.
=> Les facteurs génétiques : on trouve en effet des troubles anxieux chez les parents des patients obsessionnels.
=> Les aspects neurobiologiques : Depuis une dizaine d’années, on a découvert des dysfonctionnements au niveau du circuit qui sert à filtrer les pensées.
=> Les facteurs environnementaux, hormonaux, infectieux, traumatiques sont des déclencheurs.

LA GRANDE FAMILLE DES TOC
Il existe toutes sortes de TOC. Parmi les rituels les plus fréquents, on retrouve cinq grandes catégories :
=> Les lavages incessants : les rituels de lavage sont associés à des obsessions de contamination et de souillure (microbes, secrétions corporelles, etc.
=> Les vérifications : le patient qui souffre du TOC de la vérification doute de manière obsessionnelle. Il est obligé de vérifier tout ce qu’il fait : portes de voiture, de maison, gaz, etc.
=> L’accumulation : la victime du TOC de l’accumulation ne peut rien jeter. Papiers, vêtements jamais portés, bouteilles vides et autres objets absolument inutiles s’entassent sans que la personne ne parvienne à réagir.
=> L’obsession de l’ordre et de la symétrie : tout doit être rangé dans un ordre précis (couverture, vaisselle, etc.), aligné et ne doit absolument jamais être changé de place.
=> Les rituels mentaux : la personne se répète des phrases ou des formules, compte ou calcule sans arrêt selon un ordre et une procédure stricts.

LA MARCHE À SUIVRE POUR LUTTER CONTRE LE TOC
Les guérisons complètes sont rares, les spécialistes sont prudents et préfèrent parler de rémission partielle.
=> Le traitement médicamenteux. Il s’agit d’antidépresseurs spécifiques, les IRS (inhibiteurs de recapture de sérotonine), tels que le Prozac, le Zoloft (que l’on peut désormais prescrire aux enfants à partir de 6 ans). Il est, bien sûr, indispensable de s’adresser à un spécialiste pour suivre ces traitements qui peuvent avoir des effets secondaires et qui ne sont efficaces qu’à long terme.
=> La thérapie cognitive et comportementale. La thérapie cognitive et comportementale a pour objectif d’aider le patient à modifier les comportements qui le gênent et à diminuer ses obsessions.
=> Les cas résistants : quand la co-morbidité s’en mêle… Il faut savoir que 50 % des personnes atteintes de TOC ont un tempérament cyclothymique (alternance des périodes d’excitation, d’euphorie et de dépression). 73 % sont dans un état de dépression majeur.
Selon le Dr Elie Hantouche, les cas les plus préoccupants sont les malades qui souffrent à la fois de TOC et de troubles bipolaires (maniaco-dépressifs). Dans ce cas, les médicaments anti-TOC risquent d’induire une aggravation en l’absence de médicaments spécifiques contre la cyclothymie.

TOC : L’AVIS DU SPÉCIALISTE
Le Dr Frank Lamagnère est psychiatre, spécialiste réputé du traitement des troubles obsessionnels, des phobies et de l’anxiété sociale.

Qu’est-ce que la thérapie comportementale ?
C’est une thérapie qui s’appuie sur une méthodologie scientifique expérimentale et sur les théories de l’apprentissage. À l’inverse de l’analyse, qui ne se fixe pas de but, qui se désintéresse des symptômes, la thérapie comportementale est directive. Le thérapeute n’est pas muet ! Au contraire, il pose des questions précises à son patient et cherche à obtenir le plus d’informations possible sur la symptomatologie (ensemble des signes permettant au médecin de reconnaître une maladie). Dès le départ, ils fixent ensemble des buts à atteindre, à savoir : modifier les comportements qui gâchent la vie du patient. Pendant la séance, nous travaillons ensemble, à travers des exercices concrets. L’idée est de démystifier, d’aider le patient à dépasser ses peurs progressivement en l’exposant à une situation qui provoque son angoisse. Le thérapeute l’accompagne, il l’emmène sur le terrain. Par exemple, ce matin, j’étais avec un patient qui souffre du TOC du lavage. Il redoute la saleté, la contamination. Nous sommes donc allés dans la rue serrer la main des commerçants, une vraie campagne électorale ! C’est le phénomène de “l’habituation”. Au fil des mois, le mal-être diminue. Entre chaque séance, il se livre à des exercices concrets qu’il doit ensuite évaluer. Je l’invite également à se documenter, à lire des ouvrages spécialisés, à regarder des émissions consacrées au sujet, etc.

Est-ce que ça marche ?
La thérapie comportementale soulage 80 à 90 % des patients qui la font. Grâce à cette technique, on parvient désormais à diminuer le temps de rituel d’au moins 30 %. Mais les résultats sont très variables, certaines personnes guérissent très vite, d’autres seront atteintes de troubles indéfiniment…

Combien de séances sont nécessaires ?
Encore une fois, il y a une véritable inégalité dans la lutte contre les TOC. Certains patients progressent rapidement, d’autres ont des blocages. Cela peut donc varier de 6 mois de thérapie à toute la vie…De manière générale, il faut compter en moyenne une dizaine de mois, à raison d’une séance par semaine et, bien sûr, en incluant les exercices quotidiens auxquels doit s’astreindre le patient.

Le mécanisme obsession-rituel est exténuant pour celui ou celle qui en est victime, mais aussi pour son entourage… Que conseillez-vous aux proches de vos patients ?
De ne pas rentrer dans le jeu du malade ! C’est LA règle de base. J’utilise souvent la comparaison avec la drogue quand je m’adresse au conjoint ou aux parents du patient. Je leur demande d’imaginer ce qu’ils feraient si, au lieu d’être face à une victime de TOC, ils étaient face à un toxicomane. Je leur pose la question : “Est-ce que vous lui injecteriez de l’héroïne pour le soulager ?“. Il ne faut pas rentrer dans le rituel, cela ne ferait qu’encourager et augmenter le TOC. L’entourage ne doit pas céder à la tyrannie, il risquerait d’en devenir l’otage. J’avais une patiente qui obligeait son compagnon à changer de vêtement à chaque fois qu’il changeait de pièce. Vous imaginez l’enfer que cela pouvait être ! J’ai donc demandé à ma patiente d’écrire une lettre, qu’elle adressait à son mari, et dans laquelle elle lui demandait explicitement de ne pas céder la prochaine fois qu’il se retrouverait face à ce TOC. L’entourage a un rôle primordial à jouer dans la guérison du patient, il peut l’aider à prendre conscience de l’absurdité de ses rituels.

CONTACTS
Association Française de personnes souffrant de Troubles Obsessionnels et Compulsifs – AFTOC
L’association existe depuis 1992. Elle a pour objectif d’aider les souffrants (adultes et enfants) et leurs proches à mieux appréhender la maladie. Elle les renseigne, les aiguille, et propose des groupes de paroles aux quatre coins de la France. L’AFTOC cherche à informer le public et à promouvoir les actions de recherche. Contactez-les, les membres de l’AFTOC vous seront d’une aide précieuse. 01.39.56.67.22 (serveur vocal de l’AFTOC afin d’obtenir les numéros de téléphone de l’Association) – contact@aftoc.org –  www.aftoc.org

À LIRE
Je ne peux pas m’arrêter de laver, vérifier, compter. Mieux vivre avec un TOC, Dr Alain Sauteraud, Éditions Odile Jacob.
Manies, peurs, et idées fixes, Dr Frank Lamagnère, Éditions Retz.
Petites angoisses et grosses phobies, Christophe André, aux éditions du Seuil.
Et pour les plus petits :
Gravir une montagne de soucis pour dominer ses TOC, Aureen Pinto Wagner, Éditions du Puits Fleuri.

Pour lire la suite

Déjà abonné·e, connectez-vous !

Magazine

À lire aussi

Le NeuroGel

Nouvel espoir pour des milliers de tétraplégiques et paraplégiques du monde entier, le NeuroGel, un biomatériau synthétique, permettrait de refaire marcher les blessés médullaires porteurs de lésions anciennes, si l’on en croît son inventeur.

Inscrivez-vous à
Pour ne rien rater
Notre lettre info
1 à 2 envois par mois