Vaincre l’aquaphobie

Certains se réjouissent, avant même l’arrivée de l’été, à l’idée de plonger dans la mer ou dans la piscine. Pour d’autres, pas de jubilation… Mais plutôt une forte appréhension, car ils ont la phobie de l’eau. Et les joyeuses vacances au bord de la mer peuvent se transformer en calvaire.
LE PIED DANS L’EAU
Véronique Dufresnes et Jean-Pierre Boumati, psychopédagogues, fondateurs de la méthode Le pied dans l’eau, accompagnent depuis 1982 des personnes qui souffrent d’aquaphobie. Ils ont gentiment accepté de répondre à mes questions…
À qui s’adresse votre activité ?
Jean-Pierre Boumati : Nous nous adressons uniquement à des adultes qui veulent apprendre à nager malgré leur peur, plus ou moins envahissante selon les cas. On va du phobique, qui nous est adressé par des spécialistes, à la personne qui vient nous voir et qui nous dit : «Quand j’ai pied, ça va, quand je n’ai plus pied, je n’y arrive pas, je suis trop stressé».
Au départ, on ne travaillait qu’avec des adultes très effrayés, en piscine. Mais aujourd’hui, à la demande de personnes qui ont vaincu leurs premières appréhensions, on organise aussi des stages en milieu marin.
On traite donc de la grande phobie qui commence par la difficulté à mettre un pied dans l’eau, à la promenade palmée en mer pour nager avec des dauphins sauvages, des raies manta ou des tortues. Ce sont des balades qui peuvent durer plusieurs heures et qui ne répondent pas à une logique de dépassement de soi, mais à un désir de détente et de plaisir.
À quoi est liée ou due la phobie de l’eau ?
J.-P. B. : Certaines personnes nous confient que, dans des vies antérieures, elles ont découvert avoir été maltraitées et noyées, enfermées dans un sac, par exemple. D’autres, plus nombreuses, situent l’origine de leur peur au niveau intra-utérin. Une cause plus récente est parfois évoquée : la naissance, ce passage de l’eau à l’air.
Existe-t’il d’autres explications à la peur de l’eau ?
J.-P. B. : Une transmission familiale : «Les adultes autour de moi avaient peur et m’ont transmis cette peur». L’eau est parfois présentée aux enfants comme un élément dangereux, volontairement ou pas. Pour empêcher l’enfant de s’approcher de l’eau, on lui raconte des histoires terrifiantes du style : «Si tu mets un pied dans l’eau, un monstre marin va venir t’attraper.»
Véronique Dufresnes : Une personne peut aussi s’être sentie trahie dans un lien de confiance : elle était dans l’eau avec quelqu’un qui l’a lâchée, ou elle a eu l’impression qu’elle n’arriverait jamais à regagner la plage et elle s’est vue mourir. Simultanément, elle voyait ses amis et son mari en train de rire sur le rivage alors qu’elle était en train de frôler la mort. Ce type de situation est vécu comme une trahison et, une fois l’évènement terminé, cette émotion n’est pas exprimée. Quand on demande à la personne de raconter, elle peut dire «J’ai été emportée par une vague» ou «On m’a poussée», mais quand on lui demande : «Et après ?» Rien, après rien ne s’est passé : on ne l’a pas entendue, réconfortée ni consolée.
Traitez-vous aussi les phobies liées à ce qu’il y a dans l’eau ? Les requins ou autres poissons effrayants…
V. D. : Oui. Certaines de ces peurs sont transmises dans l’enfance. Par exemple, une femme tunisienne me disait que sa grand-mère, lors de vacances dans le désert, lui disait de ne pas approcher des buissons car il y avait des serpents. Cette peur s’est déplacée dans l’eau car les algues ou des récifs pouvaient ressembler à des buissons et étaient susceptibles d’abriter des serpents… Quand le souvenir des propos de la grand-mère est remonté, la peur a été balayée.
Et comment parvenez-vous à chasser la peur ?
V. D. : Nous fonctionnons en groupe car la synergie démultiplie les résultats.
Nous mettons en confiance les personnes pour qu’elles se sentent bien sous l’eau, pour ensuite pouvoir se laisser porter, détendues, allongées, en sachant se redresser, puis être mobile.
On joue et on rit. Tout le monde se détend avant d’aborder les techniques de nage, le grand bain, le saut ou le plongeon. D’abord, il est important de ressentir l’impression de flottement.
Pour en savoir plus sur leur méthode Le pied dans l’eau : www.pied-dans-eau.fr – Tél : 01 42 83 03 90
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