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La santé naturelle avec Sophie Lacoste

Jardiner avec le réchauffement climatique

L’évolution du climat est inéluctable et ses conséquences sur les jardins, chaque année, sont plus marquées.
Que faire ? Comment s’adapter ?

De nombreuses observations décrivent les impacts importants du réchauffement climatique sur la flore et la faune de tous les jardins : jardins familiaux et aussi jardins publics, jardins remarquables de notre patrimoine… Si la prise de conscience est réelle dans la population, pour nous, jardiniers, il s’agit de se fixer une feuille de route. Comment adapter nos pratiques ? Comment pouvons-nous réduire certaines conséquences du changement climatique ou éviter d’y contribuer ?

Des aléas météorologiques au changement climatique

Les jardiniers le savent, un épisode de gel sévère mi-mai est un évènement météorologique qui ne vient en rien contredire ou infirmer le constat du réchauffement climatique. Le climat s’intéresse à des tendances sur un temps assez long et à une échelle géographique plus vaste que celle des données météo.

Les grandes tendances de l’évolution du climat dans nos régions

 Des phénomènes climatiques soudains et intenses (pluies diluviennes, coups de vent, très fortes chaleurs…) plus fréquents.

– Des températures en moyenne plus élevées ; avec dans nos régions des hivers moins froids, des printemps plus précoces, des étés chauds avec des épisodes caniculaires, des automnes plus tardifs.

– Un régime des pluies plus variable et modifié : sur l’année, le nombre de jours de pluie diminue en été, alors qu’en hiver il augmente avec des pluies plus intenses et, pour certaines régions, des quantités cumulées en hausse. La fréquence des épisodes intenses s’accroît avec une répartition géographique variable.

– Des épisodes de sécheresse plus précoces, plus intenses et plus longs. Ils résultent d’un déficit pluviométrique et/ou d’une évaporation intense provoquée par la chaleur, le vent.

Un état des lieux pour les jardiniers

Automnes et hivers moins froids

• Arrêt tardif de la végétation ou pas d’arrêt de la végétation : la chute des feuilles des arbres est décalée, la flore adventice se maintient, voire continue à fleurir et à grainer, et les plantes potagères aussi. C’est régulièrement le cas du séneçon ou du plantain lancéolé dans mon jardin et des physalis que je récolte jusqu’en décembre !

• Réduction de la période de constitution des réserves pour les pérennes ou vivaces, ce qui peut les fragiliser en cas de coup de froid ou de sécheresse, ou réduire leur durée de vie.

• Besoins en froid non satisfaits, notamment pour les fruitiers (pommiers, poiriers…), entraînant des perturbations du cycle végétatif, débourrements échelonnés, moindre qualité des fleurs, réduction de la production…

• Absence des effets positifs du froid qui détruit les œufs et larves de parasites des cultures.

• Absence de la fragmentation par le gel des mottes en sol argileux qui reste plus compact.

Printemps plus chauds

• Entrée en végétation plus précoce avec plus de risques de dégâts par le gel.

• Croissance rapide, tissus plus riches en eau ; risque de tissus plus fragiles, sensibles au gel et aux parasites.

• Croissance rapide générant une forte demande en eau, risque de manque d’eau au moment de la fructification ou du grossissement des fruits.

• Entrée en activité précoce de l’entomofaune et des champignons parasites ; risque d’avoir davantage de générations par an ou des pullulations.

Étés chauds ou caniculaires

• Forts besoins en eau alors que les ressources ne sont pas suffisantes.

• Arrêt de végétation du fait de la fermeture des stomates pour lutter contre l’évaporation.

• Perturbation de la floraison, avortement des bourgeons floraux ou des fleurs, altération ou destruction du pollen.

• Chutes des jeunes fruits peu après la nouaison.

• Arrêt du grossissement des fruits ou des tubercules, apparition de structures filandreuses ou spongieuses.

• Réduction de la photosynthèse des espèces tempérées si l’amplitude thermique jour/nuit est trop faible, surtout pendant les canicules.

Pluviométrie hivernale forte / Pluviométrie estivale déficitaire et aléatoire

• Pluviométrie excessive : ruissellement, érosion, glissement de terre…

• Sol inondé, ennoyé : asphyxie racinaire, pourriture des plants en place, lessivage des éléments minéraux, perturbations de la faune du sol.

• Sécheresse de la terre : apparition de fentes de retrait en sol argileux, croûte de surface, mottes très dures, réduction de la pénétration de l’eau avec fort ruissellement, perturbation de la faune du sol.

Un jardinage différent…

Face à l’urgence et à la complexité de la situation, l’adaptation des pratiques de jardinage englobe nécessairement une logique de “durabilité” qui est familière aux jardiniers bio, aux permaculteurs et aux praticiens de l’agroforesterie. Leurs pratiques contribuent à la lutte contre les effets du réchauffement climatique.

Des constats à l’action : jardiner autrement

Tout jardinier sait qu’il n’y a pas de recette en matière de jardinage. Les propositions ci-après concernent le changement climatique et ne prennent pas en compte les aléas météo ou les spécificités locales (sol, pente, exposition…). Le jardinier doit faire ses choix. Ainsi, il n’y a pas une réponse à la question “le réchauffement climatique permet-il de commencer à jardiner plus tôt ?” mais un conseil : essayez et tenez-vous prêt en cas de gel !

Jardiner, c’est agir sur trois systèmes en interactions permanentes : le climat – le sol – les plantes et leur cortège faunistique.

Voyons quelles pratiques de jardinage permettent de s’adapter ou de limiter les effets négatifs du climat.

Côté climat, que faire ?

– Préservez la ressource en eau

• Favorisez la pénétration de l’eau dans le sol et sa rétention : préférez les surfaces perméables (gravillons, dalles séparées par un filet d’herbe), décompactez les sols tassés, maintenez un couvert végétal et une teneur en matière organique suffisante (> 2 %).

• Installez des récupérateurs d’eau plutôt là où les eaux de pluies vont ruisseler ; récupérez certaines eaux domestiques pour l’arrosage (voir l’article de Nat Sinob dans ce numéro).

• Optez pour un système d’irrigation économe (goutte à goutte enterré, ou oyas… voir R-S n°223 et aussi dans ce numéro) et entretenu pour éviter toute fuite ou gaspillage.

• Arrosez uniquement si cela est nécessaire, le soir ou le matin très tôt.

• Renoncez à certaines espèces ou variétés de plantes trop gourmandes.

– Favorisez la baisse des températures à l’échelle du microclimat du jardin.

• Pour le stockage du CO2, plantez des arbres bien adaptés localement, qui auront une croissance régulière et feront du bois dense.

• Plantez des arbres pour abriter des vents, pour faire de l’ombre…

• Évitez les sols nus.

– Tenez-vous prêt pour protéger le jardin (plantes et sol) des différents stress que pourraient provoquer directement ou indirectement des évènements météorologiques.

• Utilisez des protections produisant peu de CO2 à la fabrication, contre la grêle, le vent ou, par exemple, contre le froid : paillage, voile d’hivernage…

• Réduisez l’impact des pluies : buttez les cultures, couvrez les sols avec des déchets organiques…

Côté sol, que faire ?

Le sol présente une certaine inertie ; ses réponses aux interventions du jardinier ne sont pas immédiates, mais il est essentiel par son effet tampon sur la ressource en eau, sur la température et sur la santé des plantes.

– Protégez la faune du sol et favorisez son activité (voir R-S n° 209, 222 et 224), c’est elle qui dégrade et incorpore au sol les déchets végétaux pour en faire de la matière organique et contribue aussi à l’alimentation des plantes.

– Augmentez la teneur en matière organique, celle-ci multiplie par 7 la quantité d’eau retenue par le sol, et contribue à l’alimentation de la faune du sol et des plantes.

– Aérez ou décompactez le sol pour faciliter l’enracinement, pour éviter l’asphyxie des racines, favoriser la pénétration de l’eau dans le sol et favoriser l’activité de la faune souterraine.

– Protégez les composants et la structure du sol en le couvrant pour prévenir ou limiter l’évaporation de l’eau, l’érosion des éléments fins, l’apparition d’une croûte de battance en sol limoneux ou des fentes de retrait en sol argileux.

– Privilégiez les techniques douces pour travailler la terre (R-S n° 209, 222 et 224) et si vous apportez des amendements ou engrais, faites-le sans à-coups.

Côté plantes, que faire ?

– Favorisez la culture d’espèces et variétés adaptées à la chaleur, moins exigeantes en eau l’été et à faible besoin en froid.

• Plantes cultivées dans le sud (aubergine, poivron, fève, lentille, chêne vert, mimosa, agapanthe…), des variétés spécifiques (rosier pimprenelle, rosier de Damas…) ou nouvellement sélectionnées.

• Fruitiers tels que l’amandier, le grenadier, le figuier, l’arbousier…

– Plantez des arbres originaires du bassin méditerranéen ou du centre de l’Europe, qui ont des petites feuilles, nombreuses, épaisses, avec du duvet ou cireuses, ils font baisser la température. Diversifiez les espèces pour avoir des intensités d’ombre et des litières différentes.

– Favorisez la culture d’espèces indigènes, surtout pour le verger et les haies.

– Faites vos graines et vos plants, cela semble favoriser l’adaptation au microclimat local.

– Structurez le jardin avec diffé- rents étages de végétation (arbres, arbustes, arbrisseaux, herbacées) pour freiner les vents, canaliser les courants d’air, produire de l’ombre au bénéfice des plantes sensibles.

– Laissez une zone naturelle dans un coin du jardin et/ou remplacez la pelouse par une prairie fleurie à faucher une fois ou deux par an.

– Semez et plantez si possible à des dates permettant de faire coïncider les forts besoins en eau avec la disponibilité en eau ou les possibilités d’arrosage. Dans un contexte d’automne sec, profitez de la rosée et de l’eau encore disponible pour les semis et plantations des légumes d’hiver ; leurs besoins en eau seront maximaux alors que les nappes seront rechargées par les pluies hivernales.

– Profitez des températures plus élevées, échelonnez les semis et plantations pour des récoltes plus tardives. Semez assez tard en saison, en pleine terre ou sous abri léger : salades (chicorées, mâches, roquette), légumes feuilles (épinards, tétragones…), navets, fèves, pois. Certaines espèces au potager (salades, épinards, physalis…) ou au jardin d’ornement (anthémis, pélargonium, géranium, achillée, coréopsis…) peuvent passer l’hiver dehors !

– Associez les cultures et les plantations pour optimiser l’occupation de l’espace, l’accès à la lumière et l’effet d’ombrière. Les plantes hautes telles que les haricots, tournesol, maïs, topinambours, tomates peuvent protéger les salades, les radis, de jeunes plants de choux…

– Installez des ombrières mobiles si la température est forte, renforcez l’effet en les arrosant en soirée et/ou en début de matinée, ou en les couvrant avec un tissu épais et humide.

– Limitez le stress hydrique de l’été

• Arrosez modérément les jeunes plantations, arrosez peu souvent mais copieusement.

• Arrosez lorsque c’est nécessaire ; n’arrosez plus les tomates lorsqu’elles commencent à changer de couleur, vous ne perdrez pas beaucoup en calibre et y gagnerez sur le plan gustatif.

• Paillez sur le rang et entre les rangs ; n’hésitez pas à prévoir 15- 20 cm d’épaisseur avant l’arrivée des chaleurs et complétez régulièrement le paillage.

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