communauteSans
Communauté
boutiqueSans
Boutique
Image décorative. En cliquant dessus, on découvre les différents abonnements proposés par Rebelle-Santé
S’ABONNER

La santé naturelle avec Sophie Lacoste

L’humeur est dans l’assiette

Moduler son humeur en mangeant? C'est possible! Quels aliments privilégier pour retrouver le moral? Pour plus de punch? Pour être plus zen? Le menu anti-stress ou le menu du mordant, pour composer votre humeur sur mesure, suivez le guide...

Par Thierry Souccar

UNE COMPÉTITION FÉROCE
Pour parvenir au cerveau, les acides aminés neutres en circulation (tryptophane, tyrosine, phénylalanine, histidine, leucine, isoleucine, valine, thréonine et méthionine, appelés aussi LNAAs) se heurtent au filtre que constitue la barrière hémoméningée, et n’ont d’autre choix, pour la franchir, que d’emprunter le même transporteur spécifique, une macromolécule. Mais la capacité de ce taxi est limitée, et les LNAAs se livrent une compétition féroce pour y accéder. En temps normal, le tryptophane est désavantagé par rapport à la phénylalanine et à la tyrosine, car les protéines n’en contiennent qu’1 à 1,5%. Ainsi, un repas riche en protéines se traduit-il par une baisse de sérotonine (“hormone anti-stress”) au profit de la dopamine et la noradrénaline (au contraire “excitantes”). Mais, avec un repas glucidique, le taux de sucre sanguin s’élève, précipitant l’intrusion d’un troisième larron: l’insuline. Celle-ci favorise alors l’accès du tryptophane au cerveau.

Dopamine d’une part et sérotonine de l’autre ont des effets bien connus sur le comportement. “Pour schématiser, explique le docteur Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute, la tension pulsionnelle est modulée par la dopamine, qui joue un rôle d’accélérateur, et la sérotonine, qui joue un rôle de frein. Ainsi, une sérotonine basse exacerbe agressivité, syndrome dépressif et tous les risques de dépendance : tabac, alcool, drogue, voire suicide.” Les niveaux de ces neurotransmetteurs sont certainement fixés génétiquement, mais Judith Wurtman a émis l’hypothèse que certains d’entre nous utilisent l’alimentation comme régulateur psychique.
C’est probablement ce que font les enfants hyperactifs. On croyait le sucre à l’origine de leur agitation, mais on confondait simplement la cause et l’effet : le sucre, on l’a vu, fait grimper la sérotonine et joue le rôle de calmant. Ces enfants souffriraient d’une carence chronique en sérotonine qu’ils chercheraient à compenser par un apport de sucré.
Après un repas de protéines, le tryptophane, acide aminé plus rare que les autres, leur laisse le passage. Ainsi, un tel repas entraîne-t-il une baisse du tryptophane cérébral (donc de sérotonine “apaisante”) au profit d’une augmentation de tyrosine et phénylalanine (précurseurs des stressantes dopamine et noradrénaline).
Après un repas glucidique, le taux de sucre sanguin s’élève, déclenchant la sécrétion d’insuline. Sous son action, les cellules musculaires captent les acides aminés en circulation, sauf le tryptophane, peu sensible à l’insuline. Débarrassé de cette concurrence, le tryptophane peut franchir la barrière hémoméningée. Il est alors transformé en sérotonine dans les neurones.

DES GLUCIDES QUI DÉPRIMENT
Judith Wurtman estime que “80% des obèses ont une forte attirance pour les glucides, gâteaux et crèmes glacées,” ce qui témoigne probablement d’un déficit sérotoninergique. Les boulimiques, les femmes qui souffrent de syndrome prémenstruel pourraient bien être dans le même cas. “Dans le cas de la dépression atypique, souligne Judith Wurtman, on constate souvent une consommation très importante de glucides simples et complexes. Si les gens consomment des glucides, c’est parce qu’ils ont un effet tranquillisant, similaire à celui des antidépresseurs.

Si l’effet des glucides sur le niveau de sérotonine est aujourd’hui accepté, la théorie de “régulation” esquissée par Judith Wurtman manque encore de bases cliniques. Certes, après un repas glucidique, les rats préfèrent ingurgiter des protéines, alors qu’un repas riche en protéines les pousse à choisir ensuite des glucides. Certes, un médicament sérotoninergique comme l’Isoméride (dexfenfluramine, aujourd’hui retiré du marché) avait pour effet de diminuer l’appétit, mais cette diminution n’affecte pas particulièrement les glucides.

Repas riche en protéines
Beaucoup de tyrosine – Beaucoup de phénylalanine – Peu de tryptophane
=> Transformation en priorité de tyrosine et phénylalanine en dopamine et noradrénaline = STRESS

Repas riche en sucres
Peu de tyrosine – Peu de phénylalanine – Peu de tryptophane – De l’insuline
=> Tyrosine et phénylalanine captées par les muscles – Transformation du tryptophane en sérotonine = CALME

VOTRE ENFANT MANQUE-T’IL DE SÉROTONINE?
Pour Jean-Paul Curtay, le diagnostic est rapide. “Ces enfants s’énervent facilement, tolèrent mal la frustration, s’endorment difficilement. Ils sont calmés par le sein, l’alimentation, le sucré.” Pour diminuer les risques d’impulsivité et, plus tard, de dépendances diverses, Curtay plaide pour la prévention : “Il faut les diriger vers l’automédication non toxique et le sport.” Une étude a montré qu’au cours d’un jogging de 2 heures, le niveau de tryptophane cérébral était multiplié par 2. Au plan diététique, plutôt que les sucres rapides (confiseries) par lesquels ces enfants peuvent être attirés, Judith Wurtman conseille une alimentation riche en glucides peu raffinés, à index glycémique bas, “tout aussi efficaces pour maintenir des niveaux élevés de tryptophane et donc de sérotonine.”

Les aliments suivants peuvent constituer un repas glucidique à effet relaxant: pain de seigle ou d’orge complet au levain, haricots, pâtes, riz complet, flocons d’avoine, maïs, choux, lentilles, bananes, dattes, fruits secs.

VOUS VOULEZ ÊTRE SAIGNANT.E?
L’objectif dans ce cas, n’est plus la sécrétion de sérotonine, mais bien de dopamine. Exit les glucides, place nette aux protéines, riches en L-tyrosine, un acide aminé qui minimise l’action du tryptophane et augmente le niveau de dopamine — même si l’enzyme de conversion, la tyrosine hydroxylase, est rapidement saturée. “Pour être énergétique, confirme Curtay, on a intérêt à prendre un petit déjeuner plus protéique qu’il ne l’est d’ordinaire, et poursuivre par un déjeuner relativement protéique.

Les aliments suivants peuvent constituer un repas protéique: spiruline, soja (farine ou lait), viandes blanches, lait écrémé en poudre, fromage, yaourt maigre, poissons, crustacés, viandes rouges, abats, charcuterie, oeufs.

Pour lire la suite

Déjà abonné·e, connectez-vous !

Magazine

À lire aussi

Inscrivez-vous à
Pour ne rien rater
Notre lettre info
1 à 2 envois par mois